Un découvert bancaire autorisé peut coûter cher si son plafond est dépassé. Un gérant d’entreprise l’a appris à ses dépens en comparaissant devant le tribunal correctionnel.
Assidu à ce genre de situation délicate "d’autocrédit", le gestionnaire avait fait sans réfléchir un chèque de 70.000 euros pour une boîte d’intérim, afin d’engager des ouvriers pour ses multiples chantiers. Mais malgré une tolérance admise par sa banque jusqu’à 200.000 euros de déficit, le titre de paiement revenait avec la mention "sans provision".
Après un temps d’attente, l’agence de placement déposait plainte le 16 septembre 2019.
Avec son compte dans le rouge des plus écarlates, s’agissait-il d’une mauvaise gestion du dirigeant ou d’un choix préférable afin d’éviter de puiser trop d’argent dans sa trésorerie? Car le président Jérôme Fougeras Lavergnolle s’est étonné à l’audience de noter sur le relevé bancaire de la société monégasque un solde négatif bien au-delà de 300.000 euros.
"Je ne l’ai pas fait
de mauvaise foi"
À la barre, le prévenu n’a pas contesté l’émission du chèque.
"Je ne l’ai pas fait de mauvaise foi. J’ignorais évidemment que mon passif avait atteint plusieurs centaines de milliers d’euros."
Et de lâcher ex abrupto: "Auparavant, il n’y avait jamais eu de problème avec l’agence d’intérim. Jusqu’au jour où un contentieux est apparu dans nos relations..." Incompréhension du magistrat quand il constate dans le dossier un document mettant en garde le détenteur sur son compte insuffisamment approvisionné.
"Pourtant, un mois auparavant, votre établissement bancaire vous avait adressé un courrier en recommandé pour vous informer sur le découvert excessif. Comment l’ignorer? Je note que vous n’avez jamais été condamné à Monaco. En revanche, il y a deux mentions sur votre casier français."
La partie civile a aussitôt fait part de ses doutes sur la bonne foi du prévenu.
Pour Me Maeva Zampori, "le chèque a été retourné deux fois et la banque l’a alerté sur l’importance du dépassement. Monsieur avait parfaitement connaissance de la provision insuffisante au moment de la signature. Nous réclamons les 70.000€ plus 3.000€ de dommages et intérêts."
Outre la situation réprimandable d’un découvert bancaire, le parquet s’est surtout attaché aux intentions.
"Un découvert faramineux"
"Un solde indisponible? Il était important d’avoir au moins la précaution de surveiller son compte, a estimé le substitut Emmanuelle Carniello. Ce n’est pas sa signature sur le recommandé? Le facteur aurait-il fait n’importe quoi? Cela fait beaucoup trop pour un découvert faramineux. Préférer ne pas savoir est le début de l’infraction pénale: 5.000 euros d’amende avec sursis."
Me Franck Michel ne va pas contester l’élément à l’origine de l’infraction.
Mais il n’a pas oublié de revenir sur le fameux différend: "La société plaignante aurait émis de fausses factures qui ont déstabilisé la trésorerie de mon client. Pour le reste, c’est une négligence et le prévenu a pu toutefois émettre ce chèque de bonne foi. Réduisez au moins le quantum des demandes."
Le tribunal a suivi les réquisitions du ministère public et le gérant quinquagénaire devra verser à la partie civile le montant du chèque plus une somme de 1.000€ euros pour le préjudice causé.
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