La réalité de la violence morale au sein d’un couple vivant en Principauté avait été dénoncée au cours d’une précédente audience. Brièvement, l’épouse, apparemment humiliée, avait fait part du comportement inacceptable de son mari à l’amorce de leur séparation, jusqu’à engendrer une fragilité psychologique, relayée par trois jours d’ITT. Domination, intimidation, contrainte, répression, agressions verbales… étaient dénoncées.
Toute cette force des maux ressentis dans l’intimité du foyer entre la mère et les enfants apparaissait odieuse dans le prétoire. L’intensification progressive et constante de la brutalité relationnelle avait totalement supplanté les années de bonheur vécues dans le contexte amoureux du début. Et pour finir, tout concourait jusqu’au divorce à déclencher évidemment la guerre!
Il lui envoie près de 11.000 messages
Alors, c’est le chantage au droit de garde avec deux gamins en otages de trois et quatre ans. Une salve de onze mille messages SMS échangés, des plaintes et une collecte de témoignages pour peser dans ce dossier en faveur de la victime. À la demande du président Jérôme Fougeras Lavergnolle, cette dernière personne intervient.
Peu d’explications, à part une litanie de reproches avec les éternels clichés de rupture: "monsieur privilégie son parcours professionnel de sapeur-pompier; il ne pense qu’à ses loisirs; il est responsable de la dégradation de la vie commune, il a détruit l’union sacrée…" En réaction, cet homme se décharge des responsabilités excessives accumulées par son ex-femme en alléguant contradictions, divergences, opposition pour les justifier.
Un conflit sur fond de relation extraconjugale?
L’incidence des actes dont on lui fait grief ne serait qu’une conséquence logique de l’épreuve douloureuse subie dès qu’il avait eu connaissance de la relation extraconjugale de son épouse.
Le magistrat ne perd pas une miette des paroles débitées. Il demeure attentif aux rivalités d’intérêts et il constate que prévenu et plaignante ont bien l’intention de camper fermement sur leurs positions réciproques. Leur maître mot: ne rien céder. On ne peut le nier: il y a entre eux des divergences inconciliables.
On reste toutefois surpris quand la partie civile, représentée par Me Kim Camus, du Barreau de Nice, lance: "On est venu chercher la paix! Et de poursuivre aussitôt pour définir l’adversaire dans ce dossier, il y a un rapport de domination. Pour monsieur, il fait ce qu’il veut et tant pis pour les décisions de justice; il n’y a pas de problème pour exprimer sa toute-puissance. Vous avez-là une infraction avec un ego surdimensionné. Le conjoint coche toutes les cases de sa stratégie et il utilise les enfants pour accéder à ses volontés. Il retourne toujours la faute sur madame et jubile face à sa détresse. Ma cliente veut juste que cela s’arrête. Nous réclamons 3.055€ pour les dommages plus 1.500€ de frais."
Le premier substitut Valérie Sagné met en exergue un père dépassé au sein d’une séparation douloureuse mal vécue.
"Les messages envoyés sont-ils habilités pour harceler? Y a-t-il une véritable stratégie de la part du prévenu? Je crois surtout qu’il culpabilise pour que sa femme revienne. C’est la complexité de la recherche de l’effet escompté. Madame téléphone à son amant alors qu’elle est chez son mari! Ce n’est pas le cas d’école que l’on rencontre. Ça manque de classe. Monsieur veut obtenir, récupérer et il va bien au-delà pour démontrer sa frustration de la séparation. Alors, est-ce une stratégie? Vouloir blesser, est-ce harceler? Pour la fragilité de ce dossier je sollicite une peine d’amende de 3.000 euros."
Après avoir mis l’affaire en délibéré, quatre semaines plus tard le tribunal a prononcé la relaxe du prévenu.
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