C'est en évoquant la mort de son aimée, inconsolable, que Lamartine a composé le fameux vers romantique qui sert de titre à cet article. En extrapolant sans vergogne, c'est un sentiment d'absence, également, qui frappe et attriste le marché de l'immobilier du luxe sur la Côte d'Azur. Qui manque ainsi à l'appel ? La clientèle russe, bien sûr, et, dans une moindre mesure, les acheteurs en provenance du Moyen-Orient.
Après avoir « flambé » et occupé tout l'espace, les acquéreurs russophones ont en effet quasiment disparu du tableau. « Ils ont du mal à obtenir les accords pour transférer leurs fonds, explique Michaël Fusaro, de Nice Properties, spécialiste du secteur. Il y a toujours la volonté d'acheter, mais cela n'aboutit pas ». Les tensions diplomatiques internationales ont ainsi des conséquences directes sur le marché. Tout comme la violence des événements de janvier et novembre 2015 a pu refroidir la clientèle du Moyen-Orient, occasionnant, ici encore, des ratés. « Pour eux, la raison n'est pas politique, ni financière, mais il y a désormais une hésitation à investir en France et sur la Côte », souligne Michaël Fusaro. « Il y a de gros projets qui sont en attente et on a vu de très grosses ventes, pour lesquelles tout était prêt, ne pas se faire au dernier moment ».
Heureusement, un certain nombre de transactions aboutissent bien, elles, notamment grâce au retour d'investisseurs anglais ou allemands, français aussi. « Nice, en particulier, conserve une grande attractivité pour des expatriés qui rentrent en France ou des personnes qui s'installent dans le Sud après une carrière et qui apprécient d'être si facilement reliés à Paris et aux capitales européennes », analyse le spécialiste.
Coup de cœur
Ainsi, le marché de l'immobilier de luxe reste globalement actif, mais pour les biens entre 1,5 et 5 millions d'euros. Au-delà, l'offre dépasse la demande et les plus grosses unités, celles qui dépassent les 10 millions d'euros, ont du mal à partir. C'est le signe d'un autre changement des temps « Il n'y a plus d'acheteurs qui se décident sur un coup de tête, explique Michaël Fusaro. Sur un coup de cœur, oui, mais avec beaucoup de réflexion ». Les clients connaissent ainsi très bien le marché : ils ont observé les biens qui stagnaient, le cas échéant les baisses de prix successives et ils ne se décident pas sur un claquement de doigts. Et c'est bien cette « spontanéité » toute slave qui manque aujourd'hui au marché du luxe pour lui redonner des couleurs.
Michaël Zingraf, président de Michaël Zingraf Real Estate: Qu’est-ce qu’un bien d’exception?
« Un bien d’exception n’a souvent aucun lien avec le prix. D’un côté c’est un terme général et de l’autre c’est un bien rare et presque unique en son lieu.
Un terme général, car l’on peut le trouver dans de nombreux secteurs géographiques, aussi bien en bord de mer, que dans l’arrière-pays, qu’à la campagne, qu’au centre-ville ou encore dans un village. L’exception se définit principalement parce que nous offre la nature, si cette dernière constitue le cadre du bien créé et bâti par l’homme, nous commençons à nous rapprocher de ce terme. Mais cela ne suffit pas en langage immobilier, il faut que ce bien soit équilibré, que les volumes soient enveloppants, l’ambiance sereine et une architecture extérieure et intérieure harmonieuse et pleine de charme. Tous ces critères sont difficiles à réunir, c’est pour cette raison que cela est rare et donc exceptionnel. La nature nous offre ainsi, un environnement, des paysages, des vues, des arbres. Si nous sommes capables de ne pas détruire tout cela et de nous y intégrer, le premier pas est fait. Pour le reste, le talent de l’homme peut boucler la boucle. Il s’agira par exemple d’une bastide au milieu des vignes, d’une cabane de pêcheur au fond d’une crique, une maison de village avec un jardin de curé à découvrir derrière une porte, d’une propriété pied dans l’eau sur le prestigieux Cap Ferrat, etc. Cela étant dit, ceci est ma définition, chacun aura la sienne et c’est cela qui compte ».
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