La nuit où le Prince héréditaire de Monaco est tombé sur Napoléon et les évadés d'Elbe

Dans le cadre du bicentenaire de la mort de Napoléon, évoquons cet étrange événement dans l’Histoire de la Principauté. Quand le Prince héréditaire tomba sur les évadés d’Elbe

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André PEYREGNE Publié le 30/04/2021 à 16:04, mis à jour le 30/04/2021 à 09:16
La bataille de Friedland DR

C’était le 1er mars 1815. Le printemps était déjà dans l’air. Depuis moins d’un an, Monaco était redevenue une Principauté après avoir été abolie pendant vingt ans par la Révolution et intégrée à la France.

Cette résurrection de la Principauté monégasque avait eu lieu le 30 mai précédent, après l’abdication de Napoléon et son exil forcé sur l’île d’Elbe. Le roi de France Louis XVIII, qui avait remplacé Napoléon sur le trône de France, avait œuvré pour la réhabilitation de Monaco.

Le prince Honoré IV avait été rétabli sur son trône mais souhaitait passer la main à son fils Honoré-Gabriel, futur Honoré V.

C’est ainsi qu’en ce 1er mars 1815, Honoré-Gabriel se rendait à Monaco en provenance de Paris.

Comme tout le monde, il ignorait que ce jour-là se produirait un événement qui allait bouleverser l’Europe : le débarquement à Golfe-Juan de Napoléon et d’une armée de fidèles qui s’étaient enfuis de l’Île d’Elbe.

Il le découvrit à ses dépens en arrivant à Cannes et en se faisant arrêter par des hommes qui venaient de débarquer avec Napoléon, au nombre desquels se trouvait le général Cambronne. Ces hommes le firent descendre de sa voiture. « Nous ne sommes pas des ennemis », dit Honoré-Gabriel en se faisant connaître.

Mais le général Cambronne le retint - avec respect mais fermeté - en le priant d’attendre l’arrivée de l’Empereur. Une rencontre fut organisée entre les deux hommes. Elle se produisit au cours de la nuit…

Écuyer de l’Impératrice

Les deux hommes se connaissaient déjà. Engagé dans l’armée française depuis l’âge de 20 ans, Honoré-Gabriel fit partie de la Grande Armée de Napoléon. Il fut grièvement blessé à la bataille d’Hohenlinden en 1800. Il ne reprit du service qu’en 1807. Il participa alors aux célèbres batailles d’Eylau et de Friedland. Son action entraîna sa décoration à la Légion d’Honneur.

Ayant abandonné la carrière militaire à cause de ses blessures, il fut ensuite nommé écuyer de l’impératrice Joséphine, épouse de Napoléon.

Comme le raconte René Diana, dans les Annales Monégasques (numéro 8, année 1984), Napoléon signa sa nomination le 7 juin 1809 à Schönbrunn, à Vienne, où il se trouvait avant la célèbre bataille de Wagram. Honoré-Gabriel demeura premier écuyer de Joséphine même après le divorce de celle-ci en décembre 1809. Son attitude fut appréciée par l’Empereur qui le nomma baron de l’Empire le 15 août 1810.

Hélas, en 1811, Honoré-Gabriel se trouva impliqué dans une obscure affaire financière. Napoléon décida alors de le renvoyer.

Honoré-Gabriel se trouva à court d’argent. Il dut vendre du mobilier du château de ses ancêtres de Thorigny en mars 1813 et écrivit une longue lettre émouvante à Madame de Ségur, Dame du palais de l’Impératrice.

Une rencontre
au bivouac

Mais un an plus tard, en 1814, l’Histoire allait basculer. L’abdication de Napoléon et la réhabilitation de la Principauté de Monaco. Et, l’année suivante, le retour de l’Empereur de l’Île d’Elbe.

Au soir du 1er mars 1815, Napoléon et ses hommes sont arrivés à Cannes. Ils installent leur bivouac. Il est bien au-delà de minuit quand Honoré-Gabriel est conduit auprès de l’Empereur. Que se sont-ils dit ? On l’ignore. Rien n’a filtré.

Les deux hommes auraient eu cet échange :

« - Je rentre chez moi, dit le futur prince de Monaco.

- Moi aussi, répondit l’Empereur ! »

Une fois sorti de cet entretien, Honoré-Gabriel est inquiet. Il ne veut pas être déloyal vis-à-vis du roi Louis XVIII qui règne sur la France et qui a tant fait pour la Principauté de Monaco. Il décide donc d’aller rencontrer le maire de Cannes, qui est royaliste, afin de s’expliquer.

À 6 heures du matin, il frappe au domicile du maire de Cannes, François-Augustin Poulle. Cet homme, qui n’a pas dormi de la nuit en raison du débarquement de Napoléon, accepte de le recevoir. Honoré-Gabriel souhaite obtenir de lui une sorte de certificat de bonne conduite. Le maire de Cannes prend alors la plume.

Il le racontera cet épisode par la suite : « Rentré chez moi ce jour à 6 heures du matin, je pensais me reposer lorsque Monseigneur le prince de Monaco m’a fait l’honneur d’arriver. Il m’a demandé le certificat que j’ai fait tel que suit : Je soussigné maire de cette commune de Cannes, troisième arrondissement de Grasse, certifie que Monsieur le prince héréditaire de Monaco, se rendant à Monaco, a été arrêté hier à Cannes par le premier poste des troupes de l’Île d’Elbe, qu’il n’a cessé d’avoir auprès de lui un poste, un caporal dans son appartement, et que sur les deux heures du matin il a été forcé de se rendre près le commandant des susdites troupes, en foi de quoi j’ai fait le présent certificat pour servir ce que de besoin. »

On ignorait dans quel sens allait tourner l’Histoire. Le futur prince de Monaco devait être prudent !...

En dehors d’Honoré V, une autre personnalité a établi un lien entre les familles Bonaparte et Grimaldi : Stéphanie, la fille adoptive de Napoléon Ier. Nous vous le raconterons prochainement.

Honoré V DR.

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