Son achat, ses moments les plus marquants, Vadim Vasilyev... Dmitry Rybolovlev revient sur ses dix ans de présidence de l'AS Monaco
Le président de l’ASM Dmitry Rybolovlev a accepté de revenir sur cette décennie écoulée
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Fabien PigallePublié le 17/06/2020 à 21:13, mis à jour le 17/06/2020 à 21:21
Dmitry RybolovlevPhoto JFO
Dmitry Rybolovlev, 53 ans, n’a pas pour habitude de s’exprimer dans la presse. Mais quand nous avons proposé au président de l’ASM de revenir sur la décennie de son club, “Rybo” a répondu présent.
Il faut dire que depuis son arrivée en décembre 2011, le milliardaire est passé par toutes les émotions. Du titre de Ligue 2 au titre en Ligue 1 en passant par des parcours remarqués en Ligue des champions, Dmitry Rybolovlev s’est clairement pris au jeu.
Comme tous les supporters, c’est dans la douleur qu’il a traversé les deux dernières saisons marquées par un maintien en L1 in extremis et des bouleversements profonds de l’organigramme.
Un entretien réalisé par mail. Le boss de l’ASM s’est montré incisif dans ses réponses s’exprimant toujours franchement. Surtout, il ne prend aucune pincette quand il s’agit d’évoquer les erreurs passées et continue d’affirmer ses ambitions pour le futur.
Quel était votre objectif en achetant l’AS Monaco?
L’objectif prioritaire à ce moment-là était de maintenir le club en Ligue 2. A moyen terme, c’était de revenir en Ligue 1 et y occuper une bonne place. A long terme, l’objectif était de remporter le titre de champion de France. J’avais aussi un rêve, celui de gagner un jour la Ligue des Champions, et ce rêve n’a pas changé.
Comment qualifier cette décennie écoulée?
Globalement positive. Nous avons atteint les objectifs que je m’étais fixés, et même au-delà: titre en Ligue 2, deux parcours en demi-finale et quart de finale de Ligue des Champions, cinq saisons d’affilée sur le podium. Nous avons aussi atteint deux fois la finale de la Coupe de la Ligue et, bien sûr, nous avons remporté le titre de Champion de France. L’AS Monaco est la seule équipe à avoir battu le Paris SG depuis 2013. Nous avons de quoi être fiers. Nous avons connu des hauts et des bas, c’est le sport. L’important, c’est de persévérer et garder notre cap.
Qui vous a guidé et conseillé à votre arrivée dans le football?
J’ai rencontré beaucoup de personnes: S.A.S. le Prince Albert bien sûr, des présidents de plusieurs grands clubs européens, des joueurs en activité et des anciens joueurs, des entraîneurs, des agents. J’ai beaucoup lu sur le sujet, j’ai vu de nombreux matchs, à la télévision et dans des stades un peu partout dans le monde. Après toutes ces années passées je me souviens de matchs pleins d’émotions: Boca Juniors contre River Plate dans la Bombonera, d’un derby de Manchester entre United et City, du Clasico Real-Barça, d’un match entre le Real et l’Atlético. J’ai également assisté à plusieurs finales et demi-finales de Ligue des Champions.
Quel a été votre sentiment suite au conflit avec la Ligue vous demandant de déménager le siège social? Comment avez-vous accueilli l’arrivée du fair-play financier?
Notre bon droit a été reconnu par la plus haute autorité. J’étais fier d’avoir pu défendre les intérêts du Club et de la Principauté. Concernant le Fair-play financier, nous avions bien compris à l’époque cette décision prise par l’UEFA, dont l’idée était quelque part de mettre tous les clubs sur un même pied d’égalité.
Quel a été le moment le plus fort depuis votre arrivée?
Le match à domicile contre Arsenal en 2015. Après avoir encaissé le deuxième but, c’était tellement dur que j’ai dû quitter la tribune pour rentrer dans le salon. Je n’ai pas pu continuer à regarder le match. C’est la seule fois que j’ai ressenti cela. Arsenal était proche du troisième but et de se qualifier. On a pu tenir, grâce à Subasic et toute l’équipe. C’était un match avec beaucoup de tension. Assurément un des moments les plus forts.
Quel a été le moment le plus compliqué à gérer?
Ce n’était pas un moment mais une période plus longue. Malheureusement, à un certain point, j’ai dû trop déléguer dans la gestion du club. Lors de la première partie de la saison 2018-19, l’AS Monaco s’est retrouvée dans une situation catastrophique. Au début, je ne voyais pas que le problème était aussi grand. Plus je me plongeais dans la situation du club, plus il devenait clair pour moi que la situation était très sérieuse. C’était une crise très profonde, qui touchait le mode de fonctionnement du club dans son ensemble. J’ai alors dû reprendre les commandes et corriger les erreurs accumulées à plusieurs niveaux.
Dmitry Rybolovlev a tout connu à l’AS Monaco, du titre de L2 (comme sur cette photo) au sacre en L1.Photo E.D..
Le moment le plus douloureux?
Le moment le plus douloureux, c’est la décision de remercier Vadim Vasilyev.
Que referiez-vous de différent?
Sans citer de nom, je n’aurais pas fait certains choix de personnes, qui ont conduit à cette crise. Le plus important, c’est qu’aujourd’hui, nous en avons tiré des conclusions. Nous travaillons pour corriger ces erreurs et nous commençons un nouveau chapitre de notre histoire.
Le départ de Vadim Vasilyev marque un tournant, que lui avez-vous reproché?
Évidemment, Vadim a beaucoup fait pour l’AS Monaco. Lorsqu’il était en poste, le club a eu beaucoup de succès. C’était nos succès communs. Ensuite, il a commis des erreurs sérieuses dans la gestion du club.
Étiez-vous au courant de la nomination de Louis Ducruet assistant du vice-président?
Oui, bien sûr.
Que vous inspire l’épisode de Leonardo Jardim que vous avez rappelé puis à nouveau licencié?
Je continue de penser que ma décision de rappeler Leonardo était juste. Je lui suis reconnaissant d’avoir alors accepté la proposition de revenir, et d’avoir sauvé le club de la relégation. L’objectif à court terme, celui de rester en Ligue 1, a été atteint. Les circonstances ont fait que ce n’est pas allé plus loin… Je lui serai toujours reconnaissant pour ce retour, et pour tout ce qu’il a fait au club.
Quelles relations entretenez-vous avec le Palais?
Depuis le début de notre projet commun, nous entretenons des relations de travail normales. Nous avons partagé ensemble de nombreuses victoires dans la loge au Stade Louis-II ; nous avons célébré ensemble le premier titre de Champion de France depuis 2000 (2017); en 2015, nous étions ensemble à l’Emirates Stadium pour assister à la victoire contre Arsenal. Ensemble, nous avons aussi partagé les moments sportifs plus difficiles. On se rencontre et on discute des changements nécessaires. Durant ces années, nous avons toujours reçu le soutien de son Altesse. Je comprends et je partage sa déception face à la situation actuelle mais nous travaillons pour améliorer la situation.
IllustrationPhoto C.D..
On évoque une guerre froide?
C’est complètement faux.
Votre approche a-t-elle changé? On dit que vous n’aviez pas saisi à votre arrivée l’importance du club pour le Palais?
Dès le début je savais à quel point le club était important pour la Principauté, et que c’était une grande responsabilité pour moi. L’AS Monaco est indissociable de l’histoire et de la vie de la Principauté.
Avez-vous songé à vendre le club? Si oui, pourquoi ne pas l’avoir fait? Combien d’offres concrètes avez-vous reçues?
Je sais qu’il y a parfois des rumeurs sur mes intentions de vendre Monaco. Nous les avons toujours démenties. Je crois dans le projet sportif du club. Je suis toujours l’actionnaire et le Président. Je m’occupe de son développement et j’investis dans son futur.
Pensez-vous que certains seraient contents de vous voir vendre le club malgré les trophées?
Je n’y ai pas pensé.
Qui aimerait vous voir partir selon vous?
Ça ne m’intéresse pas.
Qu’auriez-vous fait en cas de relégation?
Je n’ai jamais pu imaginer ce scénario.
Aujourd’hui, à quel niveau de décision intervenez-vous?
J’interviens pour approuver les décisions les plus importantes.
Le président russe a pour habitude monter à La Turbie dans les moments chauds de la saison. Il souhaite rectifier le tir de ses deux dernières saisons compliquées.
Photo J-F.O, E.D. C.D..
Quels sont les critères de compétences que vous recherchez chez vos proches collaborateurs au club?
La responsabilité, l’efficacité, l’intégrité, l’engagement au club, l’investissement et l’esprit d’équipe.
Vous êtes moins présent au stade, pourquoi?
Je regarde les matchs depuis une des nouvelles loges mais même lorsque je ne peux pas être présent à domicile ou à l’extérieur, ou que je sois, je regarde les matchs à la télé et je peux vous assurer que je « vis » chaque match. Après chaque rencontre, on s’appelle avec Oleg. Je ne me rappelle pas avoir manqué un seul match depuis toutes ces années.
Quelle est votre plus grande fierté?
La réponse peut paraître banale mais je vais répondre le titre de Champion de France et la demi-finale de Ligue des Champions. J’espère éprouver autant de joie et de fierté de nouveau.
Que représente le club pour vous aujourd’hui?
L’AS Monaco représente une grande partie de moi-même et de ma vie. Cela fait presque neuf ans que j’en suis responsable. Ce n’est pas qu’un investissement financier, c’est aussi beaucoup de temps, d’efforts et d’émotions. C’est un grand bonheur mais aussi, parfois, des déceptions. Le plus important, c’est l’envie d’aller chercher de nouveaux succès.
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