Les élus ont voté une proposition de loi sur la protection contre la discrimination et le harcèlement, déposée sur le bureau du gouvernement
La proposition de loi n° 109 relative à la protection contre la discrimination et le harcèlement, et en faveur de l'égalité entre les hommes et les femmes deviendra-t-elle projet de loi ? Après un débat plutôt houleux dans la Haute Assemblée, les conseillers nationaux ont voté ce texte déposé il y a un an. Un texte « cher à la majorité » a rappelé le rapporteur de la proposition devant l'Assemblée, Guillaume Rose. Cette proposition-cadre entend lutte contre les discriminations à différents paliers de la société : harcèlement professionnel, inégalités hommes/femmes… « La tâche n'est certes pas aisée au vu de la multitude des domaines concernés : handicap, grossesse, orientation sexuelle, race, convictions religieuses ou philosophiques, âge. On en peut à l'évidence être exhaustif car cela concerne toutes les formes de différence. Le principal n'est d'ailleurs pas là mais réside davantage dans le fait d'initier la démarche. »
Recevant la proposition de loi, le ministre d'État exprime « que le gouvernement est déterminé à lutter contre toutes les discriminations. Ceci dit, le gouvernement se méfie de notions à caractère trop expressives qui pourraient mettre en péril les spécificités des nationaux ». Aussi, pour Michel Roger, un délai sera utilisé pour traiter cette proposition « et préparer une réponse mesurée. Sachant que si cette proposition devient un projet de loi, il n'y aura pas d'instauration d'une haute autorité de lutte contre les discriminations[semblable la HALDE française]L'érection d'une telle autorité pose un problème de constitutionnalité et la transposition systématique d'institutions du pays voisin est une mauvaise chose pour Monaco ».
«Temps d'agir»
Pour le président du Conseil National, Jean-François Robillon, il était « temps d'agir ». «Ce qui m'a décidé c'est le bénéfice dont chacun d'entre nous pourra tirer de cette loi et surtout les plus fragiles d'entre nous. » Selon Jean-Charles Gardetto, initiateur de cette proposition, ce texte pourrait combler un « vide juridique et doter la principauté d'un cadre législatif qui lui fait défaut », poursuivant « mais nous ne devons pas attendre du gouvernement qu'ils agissent seuls. Chacun de nous devrait se demander "Suis-je tolérant ?". Nous possédons le pouvoir du peuple ». Le texte « se veut modéré », plaide Pierre Lorenzi ; plutôt « globalement positif », dixit Michèle Dittlot de l'UNAM.
« Éviter que nos spécificités soient discriminées »
Accueil plus réservé pour le groupe d'opposition Rassemblement & Enjeux. Christophe Steiner cherche la nécessité d'un tel texte « dans un pays de 35 000 habitants dont 8 000 nationaux qui jouissent de droits qui peuvent paraître discriminatoires ». Et Marc Burini d'ajouter : « Dans un pays où se côtoient 120 nationalités et où il y a une vraie mixité dans les écoles de la principauté. »
Pour Anne Poyard-Vatrican, chef de file de l'UP, « les bonnes intentions ne suffisent pas à faire un bon texte ». «Je ne suis pas du tout persuadée que l'interprétation des juges de la cour européenne des droits de l'homme par exemple soit en faveur des Monégasques et ne préféreront pas plutôt considérer l'esprit général qui prévaut derrière la lutte anti-discrimination c'est-à-dire la parfaite égalité entre les nationalités [...]. Ce qu'il faut éviter, c'est qu'au bout du compte nos spécificités sont discriminées », ajoute l'élue.
Trois abstentions (Laurent Nouvion, Marc Burini, Anne Poyard-Vatrican) ; un vote contre (Christophe Spiliotis-Saquet), la proposition de loi a été adoptée à la majorité.
CEDRIC VERANY
cverany@monacomatin.mc
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