Réforme des retraites à Monaco: "Conserver l'un des meilleurs régimes d'Europe" (Valeri)

Stéphane Valeri, le conseiller de gouvernement pour les Affaires sociales et la santé, éclaircit le texte de loi sur le régime des retraites et répond aux critiques des partenaires sociaux.

Propos recueillis par Anne-claire Hillion Publié le 23/06/2012 à 12:30, mis à jour le 23/06/2012 à 12:39
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Suite à la manifestation de jeudi dans les rues monégasques et l'inquiétude qui monte autour de cette réforme des retraites, le gouvernement répond. Cyril Dodergny

Stéphane Valeri, le conseiller de gouvernement pour les Affaires sociales et la santé, éclaircit le texte de loi sur le régime des retraites et répond aux critiques des partenaires sociaux.

Entre une conférence de presse de la Fédération patronale lundi matin et une manifestation des salariés jeudi, dans les rues monégasques, la semaine fut placée sous le signe des retraites. Stéphane Valeri, conseiller de gouvernement pour les Affaires sociales et la santé, revient sur les inquiétudes et les incompréhensions de ces partenaires sociaux et explique pourquoi la loi doit être votée, chiffres à l'appui.

Votre réaction après la manifestation contre la réforme des retraites ?

« Je tiens à rappeler qu'il y avait 950 manifestants dans les rues, pour 46 000 salariés en Principauté. On est dans la fourchette moyenne des manifestations organisées régulièrement par l'USM. Il n'y a donc pas eu de mobilisation particulière contre le projet du gouvernement de sauvegarde des retraites. La grande majorité des salariés a compris la nécessité de cette réforme. Notons une très faible participation des retraités, car il est clair pour eux que c'est un projet social qui ne les concerne pas, puisque nous avons refusé la proposition de les faire participer à l'effort, en diminuant leur pouvoir d'achat. Le maintien des retraites actuelles leur est donc garanti. Je tiens d'ailleurs à me faire l'écho de l'incompréhension de très nombreux salariés, employeurs et résidents de la Principauté, que je partage, face au dénigrement systématique du modèle social monégasque par certains. Notre système n'est pas parfait, mais bien meilleur que les autres, ne l'oublions jamais. Ce n'est pas par hasard si près de 40 000 Français et Italiens franchissent chaque jour notre frontière pour travailler en Principauté. Pour autant, le Gouvernement comprend la préoccupation de certains face à des mesures techniques complexes. Nous continuerons donc à les expliquer en toute transparence et avec la vérité des chiffres.

Le souhait de l'USM est de ne rien voir changer puisque selon ses membres, il y a suffisamment d'argent?

Si on ne change rien comme les dirigeants de l'USM le préconisent, à l'horizon 2030, il n'y aura plus de fonds de réserve et les cotisations ne couvriraient plus que 2/3 des pensions. Concrètement, on serait obligé de baisser les retraites de près de 30 % ! Et ça, ce n'est pas acceptable pour un gouvernement responsable. Ne rien faire serait laisser se produire une véritable catastrophe sociale annoncée. Il faut aussi rappeler que l'effort demandé aux salariés pour sauver le régime est très modéré. L'augmentation prévue des cotisations pour les salariés est de 0,4 à 0,7 %, ce qui représente par exemple de 8 à 14 euros par mois pour un salaire de 2 000 euros. Une deuxième mesure est prévue pour établir une égalité dans la contribution des employeurs et des employés, qui est un principe historique du régime auquel le Gouvernement tient beaucoup. Il concerne le coût d'achat du point de retraite future. On a, en effet, constaté un problème endémique à notre régime qui distribue toujours plus de points chaque année, qu'il sera incapable de payer. Désormais, nous allons stabiliser le nombre de points distribués au niveau actuel, qui est le plus élevé depuis la création du régime, en faisant évoluer le coût d'achat du point conformément à l'évolution du salaire moyen, soit sur les dernières années en moyenne de 1,1 point de plus que l'inflation. Concrètement, nous assurerons ainsi dans le futur des retraites globalement équivalentes en euros constants, à celles d'aujourd'hui. Selon eux, si l'impact est si faible, c'est que le danger n'est pas si imminent... C'est justement parce que le gouvernement s'y prend aujourd'hui, suffisamment tôt, que cela permet de faire une réforme modérée et de demander un effort limité à chacun.

Que pensez-vous de leur module de calcul sur leur site Internet qui donne des chiffres en contradiction avec les vôtres ?

Je pense que c'est un coup médiatique pour tenter de démontrer une diminution des retraites futures, mais ce n'est pas la réalité. Leur mode de calcul compare des retraites d'aujourd'hui à des retraites virtuelles futures, en oubliant de dire que l'on aurait été incapable de les payer et qu'il aurait fallu les amputer de 30% ! De plus, leurs projections sont fondées sur l'hypothèse fausse qu'aucun salaire n'évoluerait sur les vingt prochaines années au-delà de l'inflation. Ce n'est pas la vérité. En Principauté, sur les vingt dernières années, 94% de la population salariée stable a vu évoluer son salaire, en moyenne, chaque année, d'au moins 1% de plus que l'inflation. Les chiffres parlent d'eux-mêmes.

Ils estiment que la volonté sous-jacente du gouvernement est, à terme, la capitalisation des retraites ?

C'est exactement le contraire ! Notre projet de loi vise à maintenir le régime le plus solidaire, celui de retraites par répartition. Si on voulait aller vers la capitalisation des retraites, il suffirait de ne rien faire et de laisser aller la CAR à la faillite. Partout, les régimes de retraites sont en difficulté. La cause est universelle : allongement de l'espérance de vie et nombre de cotisants par rapport aux retraités en baisse. Je pense qu'il faut en appeler au bon sens de chacun et qu'une fois bien expliquée et comprise, cette réforme ne posera aucun problème, puisqu'elle est juste et nécessaire.

La Fédération patronale critique les estimations d'une augmentation de 2,5% du nombre de cotisants ?

L'avenir, personne ne peut le prévoir avec certitude. Le gouvernement a fait le choix d'être raisonnablement optimiste en tablant sur 2,5% de croissance par an des salaires taxés. Le président de la Fédération patronale a le droit d'être pessimiste, mais nous pensons que notre objectif est tout à fait réaliste, puisque la croissance a été de 2,6 % depuis 1993, et encore de 2,8 % en 2011. L'extension en mer et le télétravail sont parmi les pistes les plus sérieuses suivies par le gouvernement. Il y a déjà 16% de télétravailleurs dans les Alpes-Maritimes. Nous sommes en négociation avec la France pour permettre aux entreprises monégasques d'avoir des télétravailleurs résidant en France, tout en étant affiliés aux caisses de Monaco. On peut imaginer que plusieurs dizaines de milliers d'emplois puissent être créés, d'ici 2050, sans nécessiter beaucoup d'espace, ni alourdir la circulation. S'il s'avère que nous avons eu tort, nous referons un point en temps voulu, et nous prendrons les décisions adéquates. Pourquoi imposer tout de suite une hausse des cotisations, si cela n'est pas absolument nécessaire ? Le gouvernement croit en la réussite de Monaco.

Pourquoi est-il important que cette loi soit votée ?

Si la loi est votée nous aurons sauvé l'un des meilleurs régimes d'Europe. Même après l'application des mesures de sauvegarde, notre régime versera des pensions, à carrière et salaire équivalents, de 25 à 75% supérieures à celles du régime français. Et l'on continuera à pouvoir partir à la retraite dès 60 ans. L'objectif est de faire piloter notre régime, selon l'évolution des paramètres et de manière pragmatique, par le comité de contrôle de la CAR, l'organe le plus pluraliste composé de représentants du gouvernement, des salariés et des patrons. On ne prétend pas connaître l'avenir, mais notre projet de loi donne les moyens au comité d'être efficace pour assurer la pérennité du régime jusqu'en 2050 ».

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