"La seule envie que ça donne, c’est de sortir les fusils et de tirer dans le tas." Voilà des années que Christophe B. partage sur sa page Facebook sa haine des étrangers. "Une balle dans la tête, une autre au cœur", renchérit une "amie" en réaction à l’un de ses messages. Une haine qui virait à l’obsession.
Christophe B., 53 ans, est passé à l’acte ce samedi soir à Puget-sur-Argens. Il a tué Hichem Miaraoui, un Tunisien âgé de 45 ans, et a manqué d’abattre Akif B., un Turc de 25 ans, blessé à une main. Des vidéos de revendications postées sur son réseau social ont conduit le parquet national antiterroriste (Pnat) à se saisir du dossier.
"Là, j’ai dégommé les deux, trois merdes qui étaient près de chez moi pour commencer, parce qu’il fallait les éliminer (...) Tenez-vous à carreau les bicots, car des mecs comme moi, il va y en avoir plein, plein, tenez-vous à carreau", clame le quinquagénaire dans ces messages filmés auxquels nos confrères du journal Le Monde ont eu accès.
Adhérent au club de tir de Fréjus
Selon nos informations, Christophe B. est adhérent au Tir Club Fréjusien depuis 2023. À l’époque, il avait remplacé l’image de son profil Facebook par la photo d’une arme de poing et d’un chargeur approvisionné. "Pour la chasse", rigole alors l’un de ses cent et quelques amis. Christophe B. répond à cet ancien militaire par un "MDR" (mort de rire).
Au fil des ans, le Varois d’adoption – il est originaire des Vosges – semble s’être convaincu de l’imminence, voire de la nécessité, "d’une guerre civile" notamment pendant la crise des Gilets jaunes. Il en justifie les débordements à l’aune de ses opinions: "Il fallait voter Marine (Le Pen) et que ce soit les politiques qui virent les mauvais immigrés."
Un appel réitéré dans ses derniers messages. "C’est toujours intéressant de se faire insulter de facho par un antisémite", répond-il, le 9 mai dernier, à un internaute. "Mais tu comprendras quand tes gosses seront obligés d’embrasser l’islam."
"C’est au gouvernement que j’en veux"
Le quinquagénaire a également nourri à l’époque des Gilets jaunes une aversion pour les représentants de l’État. "Moi perso mon premier délit c’est avoir traîné un flic sur 200m, et les autres c’est des refus d’obtempérer avec ou sans violence", fanfaronne-t-il en 2019.
"S’ils m’avaient tiré dessus à chaque fois que je me barrais, je serais mort depuis bien longtemps. Un jour, un gendarme a menacé de me tirer dessus si je voulais m’enfuir. Ben je lui ai foncé dessus..."
"Après les Arabes et autres, c’est au gouvernement que j’en veux!!! C’est eux et leur politique de merde qui mettent le pays à genoux." Dans son ultime vidéo, il s’imagine mourir en martyr de sa cause, quitte à mettre fin à ses jours, retranché dans son véhicule. Il s’est rendu aux militaires de l’antenne GIGN d’Orange grâce à l’intervention d’un négociateur de la gendarmerie.
Restauration rapide et artisanat
Sur son profil public, Christophe B. n’a laissé derrière lui que des messages de haine. Ou presque. Ne subsistent que les traces d’une passion pour les salons de voitures anciennes, la mécanique et la détection de métaux.
Le tireur sportif s’enthousiasme ainsi pour un rassemblement Alpine à Fayence en 2023 et se montre nostalgique devant la carcasse, abandonnée dans une grange, de la moto de ses vingt ans. "Mon premier gros cube (...) Seuls les gens qui me connaissaient à cette époque comprendront."
Et dans des vidéos (celles qui n’ont pas été supprimées à la demande de la justice), il met en scène la découverte d’une pièce de monnaie antique enfouie dans un champ de vignes. "Les Romains sont passés par ici..."
On apprend enfin de son entourage, que lui et son épouse ont tenu un snack sur le port de Fréjus. On aperçoit aussi Christophe B. sur des photos alors que son couple tient un stand de restauration rapide à l’occasion d’une Fête du centre ancien à Draguignan. Hot dog, churros et crêpes au sucre.
Mais Christophe B. est avant tout chaudronnier. Dans les années 2010, l’artisan s’est même fait remarquer pour sa participation à la construction d’une structure métallique qui devait servir à établir un record du monde à Saint-Raphaël. "Trop fort mon mari", commente celle qui, des années plus tard, donnera l’alerte après que son conjoint a commis un crime raciste.
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