Monaco : l'application de la nouvelle garde à vue inquiète le barreau

A l'heure où les avocats français saisissent le Conseil constitutionnel pour statuer sur la nouvelle garde à vue (1), leurs homologues monégasques buttent encore sur une véritable application de cette mesure.

J.-M.F. Publié le 03/10/2011 à 07:19, mis à jour le 30/12/2011 à 19:23
Les avocats veulent une loi conforme à la Cour européenne des droits de l’Homme.
Les avocats veulent une loi conforme à la Cour européenne des droits de l’Homme. (Photo archives GRI)

A l'heure où les avocats français saisissent le Conseil constitutionnel pour statuer sur la nouvelle garde à vue (1), leurs homologues monégasques buttent encore sur une véritable application de cette mesure. Par la voix du bâtonnier Franck Michel, ils protestent contre la lenteur, voire les réticences des autorités compétentes à fournir une loi conforme aux exigences de la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH).

Si le gardé à vue, en effet, a désormais le droit de se taire et d'être assisté par un avocat au cours de son audition, la réalité semble différente. « L'application des principes de la CEDH ne nous paraît pas satisfaisante, assure le bâtonnier. Dans une affaire récente j'avais deux clients gardés à vue et auxquels on n'a pas notifié le droit au silence. Or, la procédure n'a pas été annulée au motif qu'ils n'avaient pas souhaité un avocat. Comment ont-ils pu décliner cette offre dans un français parfait alors qu'ils ne parlent que l'italien et qu'il n'est pas démontré la présence d'un interprète ? D'autre part et surtout, la Cour de révision a estimé qu'en l'état de leur refus d'être assistés par un avocat, on n'avait pas à leur notifier leur droit de conserver le silence. Pourtant, la CEDH dit le contraire : C'est a fortiori lorsqu'il n'y a pas d'avocat qu'il faut notifier le droit au silence. C'est un exemple d'application à rebours de l'arrêt Brusco et de la jurisprudence de la CEDH qui conduit à la priver d'efficacité. »

Avoir accès aux dossiers

Le président du conseil de l'Ordre est encore plus préoccupé par l'annulation de procès-verbaux d'interrogatoires. Car à ce jour, aucune procédure n'a été entièrement invalidée du fait du non-respect des principes posés par la CEDH. « Les juridictions font toujours en sorte que cette suppression n'ait aucune conséquence sur la procédure et donc sur la condamnation finale. L'annulation se limite au P.V. litigieux et ne sert absolument à rien. Même lorsque la personne gardée à vue a été interrogée sur ces déclarations irrégulières par le juge d'instruction. »

Ferait-on semblant d'appliquer la jurisprudence de la CEDH ? Est-ce totalement illusoire ? « Il est vraisemblable que les personnes condamnées dans de telles conditions engageront des recours devant la CEDH. »

Le bâtonnier évoque enfin sa version de l'accès aux dossiers. « D'après le projet actuel de loi sur la garde à vue, il n'est pas prévu qu'on y ait accès. On est en train de se calquer sur la France, où une loi récente est très critiquée parce que justement on passe à côté de l'essentiel. L'avocat doit avoir connaissance des faits reprochés à la personne gardée à vue. Sinon, il lui est impossible de la conseiller efficacement. C'est une régression des droits reconnus à la personne mise en cause par rapport à la procédure d'instruction ! Cette situation conduira immanquablement à des condamnations. Il y a un vrai problème de sécurité juridique. »

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