Uber, cette organisation controversée de transport entre particuliers à titre onéreux, aurait-il gagné la Principauté? Il semble bien que oui, au regard de la comparution d'un quadragénaire, concierge d'un immeuble de la Condamine, devant le tribunal correctionnel.
La justice lui reproche une activité de taxi sans autorisation entre novembre 2015 et juillet 2016. Le prévenu a été condamné à 2.000 euros d'amende.
140 euros pour l'aéroport
Même s'il n'est pas directement inscrit auprès de la société californienne, l'individu exercerait une concurrence déloyale envers les taxis traditionnels qui ont porté plainte auprès de la Sûreté publique. Ces chauffeurs jugent la différence de réglementation illégale et demandent une sanction.
Et pour cause: les conditions sont très avantageuses hors profession. Pas d'assurance spéciale. Ni obligation de licence accordée par le gouvernement princier qui atteint des sommes astronomiques: jusqu'à 900.000 euros!
Ils avaient pourtant mis en garde l'automobiliste à plusieurs reprises sans cacher leurs intentions… "Au cours de l'enquête, note le président Jérôme Fougeras-Lavergnolle, les policiers ont remarqué, entre autres courses, la prise en charge, à 6 heures, de personnes devant le Fairmont. Comment êtes-vous arrivé à pareilles pratiques?" Le fautif apparaît effondré à la barre et essuie souvent ses larmes. "Tout a commencé avec des touristes qui n'arrivaient pas à joindre les taxis monégasques. Ils me demandaient de leur rendre service. Je n'étais pas conscient au début d'être en infraction. J'ai réagi dès que j'ai été convoqué…"
Le magistrat s'enquiert sur les cadences des déplacements et rémunérations des trajets. L'activité n'était pas lucrative au commencement. Le prévenu jouait même le bon samaritain. "Puis les fréquences sont passées à trois fois par semaine. Il fallait amortir les frais. Alors je demandais 140 euros pour la destination aéroport de Nice et 15 euros pour un parcours intra-muros. J'avais d'ailleurs acheté un véhicule Mercedes dans l'optique de poursuivre cette activité…"
Le procureur général Jacques Dorémieux, dans ses réquisitions, ne mise pas sur le sentiment d'appartenance à une communauté. "Monsieur s'est laissé entraîner dans une spirale pernicieuse à cause d'une situation personnelle difficile. Je pense qu'une peine d'amende de 1.000 euros le remettra sur la bonne voie."
"Il a compris son erreur"
Aussitôt, la voix de stentor de Me Christophe Sosso se fait entendre. "Il n'y a aucun démarchage, ses clients sont des personnes qui habitent l'immeuble. L'activité est marginale et rien ne peut faire craindre à une organisation. Si cet homme a franchi les limites du système, c'est pour être logiquement dédommagé car il n'a aucun casier! Aujourd'hui, par honnêteté, il a quitté son emploi et en cherche un autre afin de ne pas rester dans une situation précaire… Il a compris son erreur!"
La compréhension sera plus difficile à passer pour le tribunal, qui doublera la peine requise par le ministère public.
commentaires