Ils étaient partis pour ne pas voter le budget rectificatif. Mais pourtant, ils l’ont fait avec douze voix « pour ». La marque de tensions au sein du Conseil national
Votait pas jeudi 1er octobre. À finalement voté mercredi 7… Souvent, le Conseil national varie…
"Le vote est très cohérent et s'est exprimé de façon claire,affirme Laurent Nouvion, président de la Haute Assemblée. Mon rôle consiste à écouter tout le monde et d'en dégager une cohérence."
Mercredi, le bilan de trois séances publiques fut celui-là : 12 voix "pour", 10 "abstentions" et un vote "contre".
Quand le président du Conseil national parle de "cohérence", beaucoup d'autres - y compris au sein de sa majorité - ne l'entendent pas de la même oreille.
Mais au lendemain du vote, Laurent Nouvion est ferme: "On est rentré dans un autre état d'esprit. Le gouvernement s'est engagé. Il y a eu des tensions. Je ne vous dis pas que ça a été facile. La démarche prise par le ministre de façon très solennelle sur l'extension en mer est un préalable pour qu'on revienne sur l'équilibre de nos institutions. Mon rôle est de répondre à ce geste."
"Mettre en œuvre un nouvel équilibre"
Mais les amis politiques de Laurent Nouvion n'ont pas tous la même approche puisque sept d'entre eux se sont abstenus.
"C'est la marque de fabrique de la majorité. Si elle était uniforme, on m'accuserait de bâillonner tout le monde. La vie politique est mouvante à Monaco. Notre majorité est jeune. Elle gagne en maturité ; y compris moi-même. Je n'ai aucune difficulté à le reconnaître. Maintenant, c'est très simple. C'est à moi de mettre en œuvre un nouvel équilibre."
Mais le problème ne s'arrêtera peut-être pas là. Car il semble qu'on ait dépassé le jeu du "pas vers l'autre". Sont-ce des crispations (comme il y en a déjà eu depuis le début de la mandature) ou une véritable fracture?
Car il faut être clair : après la signature d'un contrat de concession entre le gouvernement et Bouygues TP pour l'extension en mer, fin juillet, les élus de la majorité, conduite par Laurent Nouvion, étaient bel et bien décidés à voter contre le budget.
"On est partis sur cette stratégie,explique Christophe Steiner. Et quand on part sur une ligne, on s'y tient."
L'objectif des conseillers nationaux d'Horizon Monaco était non pas de sanctionner le gouvernement sur l'aspect strictement budgétaire (rappelons tout de même que le budget est record), mais sur sa politique et le manque de communication - ce que Laurent Nouvion a qualifié de "méthode Roger".
Christophe Steiner, vice-président, qui s'est abstenu mercredi soir, s'avoue aujourd'hui "désabusé".
Mais il ne mâche pas ses mots.
"Le rapport de Marc Burini a été approuvé à l'unanimité des élus de la majorité présents. Le rapporteur a appelé à ne pas voter "pour", non pas pour des raisons budgétaires mais pour des questions politiques."
Il fallait envoyer un message fort.
"J'ai toujours estimé que le budget rectificatif reflète les engagements entre le Conseil national et le gouvernement."
"Il y a un malaise"
Mais outre les difficultés relationnelles entre majorité du Conseil national et gouvernement, se dessinent également des problèmes de communication au sein même de la majorité ; du moins aux vues de plusieurs conseillers nationaux.
"Il y a un malaise, note Christophe Steiner. Il faut des hommes et des femmes qui ont du courage. À Monaco, on ne peut pas réduire les choses dans le clivage des partis. On peut discuter sur des positions. Je suis parfois d'accord avec les propos de Bernard Pasquier[de la minorité UM, NDLR].Je crois que c'est réciproque."
Quant à Jean-Charles Allavena, celui qu'on aurait pu voir comme le vilain petit canard d'Horizon Monaco, n'a-t-il pas été le premier à exprimer ce "malaise"? C'est ce même mot qu'il avait employé dans nos colonnes il y a presque deux ans…
L'ex-président du parti de Laurent Nouvion, R&E, conserve le calme qui le caractérise et dit les choses posément.
"C'est une énorme occasion ratée. D'abord, au sein de la majorité. Car depuis début septembre, nous étions tous en phase. En raison du contexte, nous étions convaincus qu'il ne fallait pas voter le budget. De ce qui se dessinait quelques jours encore avant les séances publiques, nous aurions pu imaginer une dizaine de "non" et une dizaine d'abstentions. La démarche était lancée et actée. Mais allez savoir pouvoir, le président, tout seul, a décidé de changer de stratégie. Presque en secret, il a pris le petit-déjeuner avec le ministre d'État Michel Roger jeudi matin. Une très grande majorité des élus n'ont pas été prévenus."
C'est ainsi que la séance publique du 1er octobre a dû donner quelques maux de tête à certains… "On a eu des impressions bizarres au fur et à mesure de la soirée."
Christophe Steiner explique la même chose: "Tout était clair. Les choses se sont infléchies progressivement."
Ce n'était pas une volte-face mais une véritable inflexion qui s'opérait sous leurs yeux…
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