Braquage : sans-faute et sang-froid des policiers

Au troisième jour du procès de deux des quatre braqueurs présumés de la bijouterie Cartier de Monte-Carlo, le tribunal a entendu les deux premiers policiers qui sont intervenus. Récit

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JEAN-MARIE FIORUCCI Publié le 14/12/2019 à 10:14, mis à jour le 14/12/2019 à 10:14
Le premier substitut Cyrielle Colle a salué « le sang-froid remarquable des policiers ».
Le premier substitut Cyrielle Colle a salué « le sang-froid remarquable des policiers ». archives M.A.

Un braquage sans carnage. Aucun blessé ! Sans dommage : les 127 bijoux, pour un montant de quelque 6 millions d’euros, ont été récupérés. Seules trois montres sont encore dans la nature. Le 25 mars 2017, en plein après-midi sur la place du Casino, un bain de sang a été évité dans la bijouterie Cartier. Le préjudice financier est quasi nul. Les quatre malfaiteurs ont été arrêtés : deux sur le territoire monégasque, jugés depuis mercredi par tribunal criminel. Les deux autres sont dans les prisons du département voisin des Alpes-Maritimes.

En peu de temps, le calme légendaire revenait en Principauté. Pour apprécier les raisons de cette opération réussie des services de sécurité, la présidente Françoise Carracha (*) a fait défiler à la barre deux policiers afin de s’informer sur le rôle de chacun.

« Je l’ai attrapé par la ceinture »

Un brigadier de police, véritable armoire à glace, approche en premier. Il raconte ce qu’il a vécu ce jour-là. La date restera à jamais gravée dans sa mémoire. En patrouille sur le secteur, il reçoit un message radio sur le canal de la Sûreté Publique : « Vol à main armé à la bijouterie Cartier ! » Avec son groupe et d’autres agents alertés, le fonctionnaire fait rapidement converger ses effectifs vers le point concerné. Il place ses hommes face à la boutique mais derrière une palissade qui cache les travaux du futur One Monte-Carlo.

« Vers 15 h 45, raconte l’officier, on a vu sortir trois personnes à l’allure suspecte. J’ai fait aussitôt les sommations d’usage : “Stop, police !” Les individus étaient tellement surpris qu’ils ont marqué un instant d’immobilité avant de s’enfuir dans tous les sens. Nous avons pu interpeller un jeune homme qui était dans la mauvaise direction : celle barrée par une rangée de pieux et de planches. Je l’ai attrapé par la ceinture quand il franchissait le mur de bois. Au moment de le ramener au sol, une arme de poing est tombée. C’était un revolver de couleur noire. Nous savions qu’il y en avait un autre en métal chromé, mais il n’a jamais été retrouvé. Les deux autres voleurs, plus rapides et plus agiles, ont réussi à franchir la palissade. Dans leur précipitation, un des deux à perdu sa chaussure. »

D’après son récit, le braqueur immobilisé par deux policiers au bout de l’impasse ne s’est pas débattu. Il poursuit : « Quelques instants plus tard, on a entendu des coups de feu. Mais on ignorait les raisons… »

Un agent est venu conforter les propos de son supérieur. « Au moment de sortir, les braqueurs ne se sont pas rendu compte de notre présence. Ils tenaient sacs et parapluies. Sauf un. Il avait les mains dans ses poches et était coiffé d’une casquette. Plus éloigné, un véhicule qui n’avait rien à faire à cet emplacement, semblait les attendre. Certainement pour protéger leur fuite. Quand il a démarré, j’ai tiré plusieurs fois en visant le pneu avant gauche. Malgré l’éclatement de la gomme, la voiture a continué de rouler… »

« Éviter de mettre en danger les passants »

Le premier substitut Cyrielle Colle tient à mettre en exergue « le sang-froid remarquable des policiers » avant la conclusion du fonctionnaire : « Le temps de retard pour intervenir était volontaire : c’était pour éviter de mettre en danger la population présente dans le périmètre du Casino. Avec un réseau hertzien saturé, j’ai eu du mal à passer un message afin de demander sur l’instant l’identification du véhicule. C’est la seconde fois que j’opère sur un braquage. »

Les deux accusés, jugés pour vol à main armée, connaîtront le verdict lundi 16 décembre, certainement très tard dans la soirée.

Effondrées, en pleurs, ces deux mamans se succèdent à la barre du tribunal criminel pour décrire les personnalités propres à chacun de leur fils. Elles ne supportent pas de les voir dans le box des accusés. Leur amour maternel est indélébile. Toutes les deux croient encore que leurs grands garçons ressortiront plus forts, plus honnêtes de l’épreuve carcérale. À tour de rôle, elles racontent le calvaire vécu depuis que leurs enfants sont passés du côté de la délinquance, de l’addiction aux stupéfiants. Jusqu’à l’oisiveté engendrée dans le quartier de la Zaïne, dans les hauts de Vallauris et la dérive volontaire qui les a conduits au pire : le braquage de la bijouterie Cartier, à Monte-Carlo. Ces femmes se sentent coupables… Pourtant, elles ont tout tenté pour les couvrir d’amour et les maintenir dans le droit chemin. L’une après l’autre, elles ne cachent pas leurs privations malgré leurs maigres revenus. Leurs fils étaient gentils. Jusqu’au jour où ils ont été confrontés à la violence du père ou des compagnons éphémères. Ils ont grandi dans ce climat délétère. Les mères, pour s’en sortir financièrement, travaillaient jour et nuit, étaient très peu aux côtés de leurs fils. C’est alors l’entourage nocif des quartiers défavorisés, les fréquentations qui ont pris le relais du cocon familial. C’est la chute. La descente aux enfers. L’horreur des condamnations, des prisons, des abominations. Jusqu’à la haine parce que l’on se sent rejeté. Mais aujourd’hui, ces mères ont de l’espoir. Elles sont unanimes à décrire des fils qui ont changé depuis qu’ils sont incarcérés à la maison d’arrêt de Monaco. Ça fera presque trois ans. Et peut-être plus encore. Qu’importe ! Elles les accueilleront à leur sortie car ces mamans leur ont déjà pardonné.

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