À Monaco, le délai pour obtenir la nationalité par mariage étendu à 20 ans

Les élus du Conseil national se sont prononcés en faveur d’une loi qui étend de dix à vingt ans le délai pour qu’un conjoint de Monégasque obtienne la nationalité. Une manière de préserver le modèle social?

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Cédric Verany Publié le 25/11/2021 à 12:28, mis à jour le 25/11/2021 à 11:45
Le débat a eu lieu, mercredi soir, au sein de l’hémicycle. Photo Jean-François Ottonello

En prenant la parole mercredi, Brigitte Boccone-Pagès, a qualifié le texte comme "équilibré et cohérent" sur un sujet qui a beaucoup fait parler dans les familles.

Et les élus se sont prononcés à la majorité finalement en faveur du projet de loi 1038 qui modifie les règles de transmission de la nationalité par mariage, faisant passer de dix à vingt ans, le délai pour qu’un ou une Monégasque marié.e à un conjoint étranger puisse lui transmettre sa nationalité.

"Une attitude responsable"

En 1950, le pays comptait 3.000 nationaux. Un chiffre multiplié par trois en 70 ans. Et toujours exponentiel, majoritairement par filiation; puis par naturalisation (14 %) et par mariage (19 %).

C’est sur cette frange que la loi votée entend agir. Non pas en supprimant cette opportunité mais en étendant son délai.

"Il y a ceux pour qui le statu quo est la meilleure option et ceux qui souhaiteraient que les changements apportés soient plus importants. Ce débat, qui a certainement eu lieu dans les familles monégasques, nous l’avons eu au Conseil national", a rappelé Brigitte Boccone-Pagès.

Les échanges dans l’hémicycle en ont fait état avec deux votes "contre" et trois abstentions.
Argument central: le facteur social et sa nécessité de le financer les aides apportées par la Principauté.

"Si la population monégasque tend naturellement à s’accroître, le modèle social monégasque lui, n’est malheureusement pas extensible. Ce texte doit nous faire prendre conscience de la valeur des choses, de la qualité unique des avantages offerts aux Monégasques et de la chance que nous avons de pouvoir vivre, nous loger, et travailler dans notre belle Principauté", note la vice-présidente évoquant une attitude responsable face à un choix législatif, salué aussi par le gouvernement.

"Le temps de s’intégrer pleinement à notre communauté"

Au 31 décembre 2020, le pays comptait 9.571 Monégasques. Une estimation de l’IMSEE envisage que ce chiffre pourrait atteindre 14.700 nationaux en 2070, soit près de 5.100 Monégasques de plus en 50 ans. Projection qui devrait être contredite par cette nouvelle loi.

"Ainsi, en 2070, il y aura près de 1.500 monégasques de moins par rapport au chiffre", avance le président du Conseil national.

"En plus de cet argument démographique, j’ajouterai aussi que l’acquisition de la nationalité monégasque par mariage doit se mériter avec le temps, pour des personnes qui bien souvent n’ont pas d’attache avec la Principauté au moment de leur union. Vingt ans, c’est symboliquement le temps d’une génération, pour s’intégrer pleinement à notre communauté, partager notre identité, notre culture", estime Stéphane Valeri.

Une application au 1er juillet 2022

"La loi que nous allons voter ne concerne au fond que les conjoints étrangers qui vont divorcer après dix ans de mariage. Les couples unis par l’amour ne sont pas concernés, puisqu’au bout de vingt ans, le conjoint étranger deviendra toujours monégasque. Entre-temps, les conjoints bénéficient déjà du droit au logement de leur époux ou épouse monégasque, et bien sûr notamment d’une priorité pour accéder aux emplois publics et privés", résume Stéphane Valeri. Les droits des parents d’enfants Monégasques, sont eux, renforcés dans la loi.

Et prenant en compte de la pandémie et des mariages reportés, les élus ont plaidé pour que cette nouvelle loi ne s’applique à partir du 1er juillet 2022.

D’ici là, pour tous les mariages célébrés en Principauté, le régime des dix ans sera toujours en vigueur.

Entendu dans l'hémicycle

Nathalie Amoratti-Blanc, qui a voté contre: "Si je comprends la problématique démographique, je ne peux m’empêcher d’avoir le cœur qui se serre à l’idée que pour des raisons exogènes au couple on ne puisse pas tout partager. Le mariage c’est le symbole de l’amour et du partage intégral. Si on limite le partage dans le cadre du mariage, alors on en limite la portée. Je ressens, à titre personnel, ce projet de loi comme une limitation du plein épanouissement des personnes qui croient dans l’institution du mariage".

Franck Lobono, pour: "Cette solution des vingt ans est davantage la résolution d’une équation d’un autre temps, que la réelle solution à la question actuelle de la défense du modèle social monégasque. Il est évident que Monaco ne pourra pas continuer sur le rythme actuel. Il faut donc limiter le nombre de nouveaux nationaux à l’avenir et la loi des vingt ans ne servira malheureusement qu’à ralentir la progression, tout en rendant plus instables les familles".

Béatrice Fresko-Rolfo, abstention: "Cet allongement à 20 ans j’y suis favorable. En revanche, je m’abstiendrai car si ce projet de loi met au troisième rang des personnes prioritaires pour l’accès à l’emploi les pères et mères, qui ne vivent pas sur Monaco mais qui contribuent effectivement à l’éducation par une aide matérielle est tout à fait fondé, je trouve injustifiable que ceux qui ne participent pas ou plus à cet effort matériel aient un rang de priorité supérieur à des personnes vivant sur le sol monégasque et qui participent tous les jours à la vie économique du pays".

Corinne Bertani, pour: "Pour moi, ce n’est pas le partage d’une nationalité qui vient renforcer les liens d’amour d’un mariage".

Pierre van Klaveren, contre: "Si nous nous étions fait confiance, nous aurions pu sans aucun doute trouver de nouvelles solutions à nos problématiques sans avoir à passer par le vote d’un texte qui n’est en aucune manière la bonne réponse au maintien de notre modèle social".

Karen Aliprendi, pour: "Si la volonté est celle de protéger nos enfants, la solution la plus adaptée serait, mathématiquement, la suppression de la transmission de la nationalité par mariage. Même si cette position peut paraître trop radicale pour certains, notre Principauté ne pourra plus répondre aux besoins et attentes de tous les Monégasques en matière de logement d’ici quelques années si la situation reste inchangée".

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