Le statut des fonctionnaires revu et corrigé à Monaco

En votant jeudi le projet de loi portant statut des fonctionnaires de l’Etat, les élus ont entériné un texte qui vise l’évolution de l’Administration vers une organisation plus sociale et plus juste.

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CEDRIC VERANY Publié le 02/07/2022 à 11:05, mis à jour le 02/07/2022 à 15:52
L’heure du vote, jeudi soir, dans l’hémicycle. Conseil national

C’est une loi datant de 1975 qui a subi un lifting jeudi soir en séance publique. La loi 975 portant statut des fonctionnaires a été revue et corrigée au regard de la société actuelle, « aux fins de doter la Fonction publique d’un régime juridique adapté aux besoins actuels et futurs de la Principauté », a rappelé le rapporteur Pierre van Klaveren en présentant ce long rapport devant la Haute assemblée.

Un rapport qui clôt onze années d’échanges entre le gouvernement et trois mandatures successives du Conseil national pour aboutir au texte voté jeudi soir à l’unanimité. Le sujet épineux explique la longue décennie de négociations, rappelant le rôle central des fonctionnaires dans le bon fonctionnement de l’état, qui emploie 1300 Monégasques, soit un tiers des effectifs totaux.

Priorité nationale

Si le nouveau texte propose une remise à jour des standards sociaux et professionnels, il porte une idée directrice : celle pour la première fois dans l’histoire administrative monégasque, d’énoncer le principe d’une exclusivité d’emploi des Monégasques pour prétendre à la qualité de fonctionnaire. Une précision qui n’existait pas dans la loi initiale de 1975. Même si dans les faits, depuis le début des années 80, le gouvernement n’a plus procédé à la titularisation de personnels non monégasques, à l’exception de ceux employés à la direction des Services judiciaires et à la direction de la Sûreté Publique.

Indemnités de fin d’année en hausse

Autre avancée notable : la majoration de 10 % de l’indemnité de fin d’année perçue par l’ensemble des fonctionnaires et retraités, dès décembre 2022.

Dans les détails, la réforme se veut d’ampleur pour le statut des fonctionnaires autour de quatre piliers : le renfort de l’attractivité de l’emploi, en garantissant la transparence des conditions de recrutement ; le développement de nouveaux droits et des formations professionnelles pour les fonctionnaires en poste ; la sécurisation du statut, par l’intermédiaire d’une définition plus précise des obligations déontologiques des fonctionnaires ; la prise en compte de l’évolution du fonctionnement de l’Administration.

Un congé paternité allongé

La nouvelle loi fait entrer aussi une large part d’avancées sociales pour les fonctionnaires. En allongeant notamment le congé paternité de 12 à 21 jours ; en proposant des adaptations professionnelles pour des personnes confrontées à des situations familiales compliquées ; en favorisant la mobilité et ouvrant les postes à pourvoir d’abord au recrutement interne ; en fixant de nouveaux barèmes dans les heures supplémentaires. Mais aussi en donnant un cadre officiel à la pratique du télétravail pour les fonctionnaires.

« Je crois que nous avons su dégager ensemble des mesures innovantes qui permettent de concilier un plus grand attrait des carrières proposées au sein de la Fonction publique » a estimé le ministre d’État, Pierre Dartout, en séance publique, soulignant un travail de « très longue haleine » mais se félicitant d’une Fonction publique « qui sait préserver son sens de la proximité ».

Un « texte historique »

Le texte est « historique » pour Stéphane Valeri, « car il améliore considérablement le statut des fonctionnaires qui consacrent leur vie professionnelle à servir l’État monégasque. Or, ce statut n’avait pas été revu en profondeur depuis 1975. C’est justement parce que nous ne voulions pas d’une modernisation de façade ou d’une réformette, que nous avons pris le temps de rédiger de très nombreuses contributions pour faire évoluer le projet initial », estime le président du Conseil national.

« Si l’on compare notre Fonction publique à celles de la plupart des autres pays, nous pouvons être fiers de sa contribution à la réussite du modèle économique et social monégasque. Nous pouvons être fiers aussi, que la parité ne soit plus une question, avec trois fonctionnaires sur cinq qui sont des femmes, y compris pour accéder aux postes les plus élevés. Pour toutes ces raisons, il était plus que temps de moderniser ce statut, afin que les fonctionnaires obtiennent d’importantes avancées dont ils puissent concrètement percevoir les effets. »

Entendu dans l’hémicycle, l’avis des élus

Marc Mourou : « Toujours plus attractive et efficace »

« Ces longues négociations ont pu aboutir, de manière constructive entre Conseil national et gouvernement, afin de rendre l’administration toujours plus attractive et efficace. La commission des Intérêts Sociaux et des Affaires Diverses a réalisé de nombreux amendements ayant notamment pour objet d’octroyer dans la loi une prime de vacances et la prime de fin d’année, majorées de 10 % au total, une meilleure compensation des heures supplémentaires, une priorité en interne pour l’évolution de leur carrière mais aussi une meilleure prise en compte des compétences des fonctionnaires exerçant des métiers particulièrement techniques qui, actuellement, peuvent rencontrer certaines difficultés lorsqu’ils souhaitent changer de service. Ainsi sera créée, pour ceux-ci, une prime venant récompenser l’ancienneté ».

Brigitte Boccone-Pagès : « Un statut modernisé aussi pour les fonctionnaires communaux »

« J’invite le gouvernement à déposer sur le bureau du Conseil national un projet de loi pour que les fonctionnaires communaux puissent, eux aussi, bénéficier d’un statut modernisé. Notre volonté est que le texte visant à moderniser leur statut entre en vigueur dans le même temps que celui des fonctionnaires de l’État, à savoir le 1er janvier 2023. Dans cette même logique, nous attendons du gouvernement l’actualisation du projet d’ordonnance souveraine relative aux agents de l’État, afin qu’ils bénéficient également des évolutions consacrées par ce texte, notamment en ce qui concerne la rémunération et les congés. »

Thomas Brezzo : « Un bémol sur le personnel pénitentiaire »

« Un bémol tout de même, le projet de loi initial prévoyait que le statut de fonctionnaire serait accordé, outre aux personnes de nationalité monégasque, également au personnel de la direction des Services Judiciaires comprenant ainsi le personnel de la maison d’arrêt. Le gouvernement a procédé à un amendement de suppression concernant cette disposition. Cela implique dès lors que la situation du personnel pénitentiaire ne sera toujours pas régularisée à l’issue du vote de ce texte, et que ces derniers continueront de relever d’un régime contractuel qui, par définition, est donc précaire et révocable. Il aurait dès lors été parfaitement légitime que ces hommes et ces femmes puissent enfin bénéficier d’un régime protecteur, au même titre que les autres corps qui compose la force publique. »

Béatrice Fresko-Rolfo : « Le législateur a su faire preuve d’humanité »

« Tout en étant assez éloigné du texte d’origine, le projet de loi présenté au vote est dense et complet et amène des modifications constructives. Il constitue une avancée majeure pour les fonctionnaires qui contribuent chaque jour à l’essor de la Principauté, avec des avancées qui prouvent que le legislateur a su faire preuve d’humanité. Notamment avec la possibilité de faire don de ses jours de congés à un autre fonctionnaire parent d’un enfant malade ou qui vient en aide à un proche. »

Daniel Boéri : « Nous sommes encore loin du compte »

« Ce projet de loi a une grande ampleur : d’une part, il donne clairement la priorité aux Monégasques ; d’autre part, il sécurise et protège le revenu des fonctionnaires. D’autant qu’en ces périodes économiques difficiles, toute action en faveur du pouvoir d’achat est adéquate. Toutefois, les sommes allouées à la formation sont insuffisantes. Il convient d’atteindre le minimum de 1 % de la masse salariale. Nous sommes encore loin du compte. »

Marie-Noëlle Gibelli : « Des avancées sociales »

« J’aimerais mettre l’accent, particulièrement, sur certaines dispositions qui marquent une avancée sociale comme l’allongement de la durée des congés de maternité, de paternité et d’adoption. Ce nouveau dispositif vient non seulement renforcer l’égalité entre les femmes et les hommes, mais également permettre aux parents de pouvoir profiter davantage des premiers moments avec leur enfant et de prendre le temps d’organiser leur nouvelle vie de famille. »

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