
Science Po fait sa pré-rentrée à l'ère du numérique et pour tous les campus, y compris celui de Menton
Sciences Po Menton dispense sa leçon inaugurale pour tous et c'est une "première historique"
Le 11/09 à 11h02 MàJ 11/09 à 10h41Quelques jours avant la rentrée officielle des étudiants de Sciences Po - fixée au 14 septembre - une leçon inaugurale du Collège universitaire était proposée en ligne, mercredi. Conformément au souhait (et à la nécessité sanitaire) de mettre en place, cette année, à la fois un campus physique et un campus numérique.
"C’est une leçon inaugurale historique, différente de toutes les autres. Pour la première fois, elle est proposée aux étudiants de tous les niveaux et de tous les campus", introduit le directeur de Sciences Po, Frédéric Mion, en direct sur Youtube.
Apprendre à penser
"Nous pensons que des moments comme celui-ci peuvent nourrir votre réflexion, vous aider à appréhender la complexité de notre monde pour que vous puissiez mieux le comprendre et tenter de le changer et de le rendre un peu meilleur", ajoute-t-il. Avant de donner le bâton de parole (virtuel) à Olivier Duhamel, président de la Fondation nationale des Sciences politiques, pour un exposé sur le thème "Être dans le monde, être à Sciences Po".
Après avoir fait un rapide retour sur l’actualité (Hong-Kong, Côte d’Ivoire, Biélorussie, Russie, États-Unis - sans oublier de saluer l’action des étudiants du campus de Menton auprès de la population de Beyrouth), ce dernier rappelle aux Sciences pistes qu’ils ont de la chance s’ils sont Européens - même si le monde est "violent, injuste, menacé par le réchauffement climatique". "Cela étant, vous êtes beaucoup moins chanceux que je l’ai été quand j’étais à Sciences Po. En 1971, la France comptait moins de 400.000 chômeurs, elle n’était en guerre nulle part, nous n’étions pas menacés par le terrorisme, personne ne se faisait insulter sur les réseaux sociaux, les immigrés étaient bienvenus, l’immense majorité des Français s’enrichissait, et enfin… les cours n’étaient jamais en ligne " ironise-t-il.
Soulignant, en corollaire, qu’il y avait pratiquement six fois plus de morts sur la route, que la peine de mort était en vigueur, que l’information n’était guère libérée, que les procureurs étaient aux ordres, les femmes loin de l’égalité. Et s’il y avait des épidémies, le traitement n’était pas le même.
En décembre 69, la grippe avait certes causé la mort de 25.000 personnes. "Mais je n’en étais même pas informé, reprend le politologue. L’info était restée sous les radars, il n’y avait aucun début de commencement de confinement. On laissait mourir les vieux."
Près d’un demi-siècle plus tard, la vocation de Sciences Po - où des personnalités aussi étonnantes que Marcel Proust, Christian Dior ou Léo Ferré ont étudié - n’a pas changé: "regarder loin et large".
"À Sciences Po, vous allez apprendre, comprendre, partager. Vous allez apprendre à penser par vous-même. La liberté d’opinion, d’expression, de débat, sèves sans lesquelles l’arbre de la démocratie dépérit, sont ici des valeurs cardinales", insiste Olivier Duhamel. Livrant quelques conseils aux jeunes gens qui l’écoutent : argumenter, "marier affirmations et écoute, convictions et doute", écrire, décrire, "faire l’amitié".
Vient le moment de répondre aux questions posées par les étudiants par écrans interposés. "Que pensez-vous des restrictions de liberté mises en place à l’heure de la Covid?", demande l’un d’entre eux. Olivier Duhamel rétorque que deux libertés fondamentales - d’opinion et d’expression - ne sont pas atteintes.
Libertés et Covid
"Je ne mets pas du tout sur le même plan le fait qu’on me contraigne à mettre un masque - ce que j’exècre - dans la rue ou un espace clos avec le fait qu’on m’interdise de dire ou de faire ceci ou cela. Ces restrictions-là sont infiniment plus graves (...) Restreindre ma liberté de respirer, voire d’aller et venir, pour éviter des centaines de milliers de morts dans notre pays est inévitable... donc acceptable."
Profitant d’une citation convoquée par Olivier Duhamel au terme du débat, la doyenne du Collège universitaire, Stéphanie Balme, indique qu’Albert Camus - dont la mort est survenue il y a 60 ans - sera célébré dans le programme de cette année. En particulier sur le campus de Menton.
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