Les quatre axes du plan de relance de l'économie monégasque

Mercredi et jeudi, le gouvernement princier a présenté les grandes lignes de son plan de relance de l’économie. Un plan qui repose principalement sur le numérique et le soutien aux petites entreprises.

Article réservé aux abonnés
Ludovic Mercier Publié le 11/09/2020 à 05:09, mis à jour le 11/09/2020 à 10:37
75 millions d'euros de fonds vont être alloués pour relancer l'économie à Monaco Photo JFO

Pour sa première conférence de presse, Pierre Dartout, le nouveau ministre d’État n’avait pas choisi un petit sujet: la relance. Entouré de Didier Gamerdinger, conseiller-ministre des Affaires sociales et de la Santé, et Jean Castellini, conseiller-ministre des Finances et de l’Économie, il a précisé d’emblée: "Ce plan de relance a été bâti sur le dialogue", ajoutant que tous les partenaires sociaux ont été consultés.

"À l’issue des mois particulièrement difficiles que nous venons de traverser, l’économie a plutôt bien résisté, les chiffres le montrent. Même si la situation est très inégale selon les secteurs. Certains souffrent plus que d’autres, comme l’hôtellerie. De même, les petites entreprises et les taxis ont pu être frappés de façon proportionnellement plus forte", analyse le ministre d’État.

Bien sûr, un fournisseur d’accès à internet ou une entreprise de produits pharmaceutiques, ayant a priori mieux gagné leur vie qu’une entreprise d’événementiel de moins de 10 personnes dont toute la saison a été annulée.

"Ciblé, pragmatique et évolutif"

C’est sur la base de ce constat qu’un plan en quatre parties a été établi. L’idée étant de "tenir un équilibre entre les contraintes d’ordre sanitaire et les mesures économiques nécessaires pour accompagner cette relance".

Pour relancer la machine, ce sont 75 millions d’euros de fonds qui seront débloqués, "sous réserve du vote de Conseil national".

Les différentes mesures s’inscrivent dans un plan de relance financé par des fonds qui ont pris des noms de couleurs: le fonds bleu pour le numérique, sorte de clé de voûte de la relance, le fonds vert pour la transition énergétique, le fonds blanc pour la construction, et le fonds rouge et blanc pour le commerce local.

Un plan que le chef du gouvernement qualifie de "ciblé, pragmatique et évolutif".

Pierre Dartout a présenté, hier et mercredi, les grandes lignes du plan de relance de l’économie monégasque. Photo Cyril Dodergny.

Ciblé, parce qu’il s’agira pour les autorités d’adresser les mesures aux domaines qui sont le plus en difficulté. En la matière, l’hôtellerie et la restauration, et les tourismes traditionnel et d’affaires, par exemple, ont particulièrement souffert, et bénéficieront d’un soutien particulier. "Il s’agit notamment de prendre des mesures très rapides concernant l’augmentation du pouvoir d’achat à Monaco, de façon à ce que, par la consommation, on puisse doper un certain nombre d’activités."

Pragmatique, car il s’agit ici de trouver des mesures à impact quasi immédiat, mais aussi "de travailler sur une politique plus structurelle" qui façonnera l’économie de la Principauté plus durablement. "Il faut combattre les effets de la crise, mais aussi profiter des opportunités qu’elle suscite", avance Pierre Dartout. Pour le Ministre, il est évident qu’à l’instar du télétravail, "il y a des évolutions de société qui vont être accélérées par cette crise".

Évolutif, car il s’agit là de s’adapter à la situation pour relancer au mieux l’économie. Les différents axes ont été tracés, mais le ministre d’État prévient: "Si nous voyons, au fil du temps, que telle ou telle mesure suscite moins d’intérêt, nous pourrons faire quelques transferts."

Dans son analyse de la situation actuelle de l’économie, Pierre Dartout annonce de la "satisfaction, mais pas de triomphalisme". Il dit vouloir un plan "ambitieux mais réaliste", avec des "effets immédiats et à long terme", qu’il appuie sur des fonds bleu, vert, blanc, et blanc et rouge. C’est donc un tableau tout en couleur et en contrastes que le nouveau ministre d’État brosse pour l’avenir de la Principauté. Reste à savoir si cela suffira à lutter contre la grisaille actuelle.

Le numérique, nouvelle pierre angulaire

Profiter des vaches maigres pour renforcer un plan déjà lancé, c’est la stratégie du gouvernement. Une stratégie que l’on pouvait deviner depuis quelques années, tant le programme numérique Extended Monaco a pris d’ampleur au fil du temps.

Le prince Albert II a présenté mercredi soir, devant les personnalités les plus influentes de Monaco, le plan numérique de relance économique - financé par le fonds bleu -, en ces termes: "La crise a révélé des disparités flagrantes: les économies les plus sévèrement touchées sont celles qui n’ont pas pu mettre en place les moyens et outils nécessaires pour conserver des relations solides entre l’État et ses citoyens par exemple, au même titre qu’une entreprise qui n’a pas su garder de proximité avec ses consommateurs. Aujourd’hui, plus que jamais, le numérique est devenu pour chaque pays un sujet stratégique et critique. C’est pourquoi j’ai à cœur d’amplifier son usage au sein de la Principauté en allouant 15 millions d’euros, pour qu’il aide mon pays à écrire une nouvelle page et à devenir un pays modèle en termes de numérique."

Frédéric Genta, délégué interministériel à la transition numérique, qui pilote Extended Monaco, a présenté avec enthousiasme les grandes lignes de ce plan. Et au XXIe siècle, quand on déploie une infrastructure de cette ampleur, on fait appel au cloud.

Ce nuage de données localisées sur des serveurs distants. Pour cette infrastructure, Monaco a choisi de faire appel à Amazon Web Services. D’après Frédéric Genta, "Monaco deviendra le premier pays d’Europe à disposer de son cloud souverain, mais plus encore: lorsque l’intelligence artificielle, dans un futur très proche, sera centrale pour notre économie, nous pourrons en bénéficier grâce à la puissance de calcul et de stockage du cloud."

Dans le cadre de ce déploiement, les connexions sont bien sûr essentielles, parmi lesquelles la fibre optique et la 5G, qui contribuent "à rendre la Principauté attractive", d’après Frédéric Genta. "Certaines entreprises s’installent à Monaco car il y a la 5G, cela leur permet de développer leurs produits pour être prêtes quand elle sera déployée dans tous les pays."

Pour que cette transition soit une réalité, d’après Frédéric Genta, il est nécessaire de former les utilisateurs. Pour cela, un grand plan de formation sera déployé pour que toutes les entreprises de Monaco puissent se mettre à niveau, avec des formations dispensées par des acteurs internationaux, comme Facebook.

Pour développer le e-commerce, des partenariats seront développés avec Amazon Market Place, la plateforme de vente du géant mondial de la vente en ligne, et avec Paypal, le leader mondial du paiement dématérialisé.

C’est véritablement un tournant stratégique qu’opère la Principauté, en se dirigeant vers des activités à hauts revenus, et dont l’occupation foncière est très largement inférieure aux industries installées autrefois dans le quartier de Fontvieille. Un virage qui correspond d’avantage aux nouvelles réalités économiques, et aux contraintes géographiques de Monaco.

Le fonds blanc

Les secteurs du bâtiment et de la construction bénéficieront d’un soutien à hauteur de 20 millions d’euros. S’appuyant sur la qualité de vie, argument politique en vogue depuis les dernières élections, le gouvernement propose, entre autres, aux particuliers une aide aux petits travaux dans les logements, pouvant aller jusqu’à 2.000 euros pour les seniors, et 1.500 euros pour les personnes âgées de moins de 65 ans, et couvrant au maximum 20% du montant des travaux.

Les entreprises monégasques bénéficieront également d’une augmentation du nombre de marchés en gré à gré, c’est-à-dire, hors appel d’offres. Elles bénéficieront également de l’augmentation des budgets alloués à la rénovation, l’amélioration et l’extension des bâtiments domaniaux.

Le fonds vert

Le gouvernement souhaite profiter du renforcement de la prise de conscience qui a eu lieu pendant le confinement pour poursuivre sur la voie de la transition énergétique, tout en en faisant un levier de croissance.

Ainsi, 25 millions d’euros supplémentaires seront alloués notamment au remplacement des fenêtres, avec notamment des subventions de 40% pour les cinq premiers logements, à hauteur de 400 euros par fenêtre, et de 30% du sixième au dixième logement, à hauteur de 300 euros par fenêtre. Les subventions sont versées aux entrepreneurs, avec une rallonge supplémentaire de 5% si l’entreprise est monégasque.

Il s’agira aussi de lancer des appels à projets de rénovation énergétique exemplaire de bâtiments selon le label des Bâtiments durable méditerranéens de Monaco (BDMM).

Le fonds blanc et rouge

L’idée, ici, c’est de "doper la consommation" locale. Acheter à Monaco, consommer à Monaco. Pour cela, le fond aux couleurs du pays disposera d’un budget de 10 millions d’euros.

Il servira, entre autres, à couvrir les frais de fonctionnement de l’application Carlo, habituellement pris en charge par les entreprises. Cette application permet d’obtenir du cashback (des ristournes, au sens comptable du terme), lorsqu’on l’utilise chez un commerçant à Monaco (Monaco-Matin du 15 juillet).

Les fonctionnaires bénéficieront en fin d’année de bons d’achat utilisables exclusivement à Monaco, pour 4,3 millions d’euros, et de tickets-restaurants à hauteur de 80 euros par mois et par personne, sans participation du salarié, soit un budget d’un million d’euros.

 

Pour l'emploi

- Le CTTR (chômage total temporaire renforcé), qui a permis aux entreprises de se décharger de la charge financière des employés, et dont bénéficiaient encore 6 174 personnes en juillet dernier, sera prolongé jusqu’en octobre. Idem pour l’exonération partielle de charges patronales.

- Le travail à distance assoupli, dont bénéficient actuellement encore plusieurs milliers de travailleurs, sera maintenu jusqu’en décembre.

- Le stage de pré-embauche, qui permet aux entreprises de "tester" un jeune avant de l’embaucher, sera élargi aux demandeurs d’emploi. Durant cette forme particulière de "période d’essai", le bénéficiaire de ce stage touche une indemnité versée par l’État, dont le montant dépend de plusieurs facteurs, mais reste inférieure au salaire correspondant au poste.

- Clause de sauvegarde pour l’embauche d’un salarié ayant 20 ans d’ancienneté à Monaco, pas forcément dans la même entreprise, et qui serait "licencié Covid".

Isabelle Bonnal a rappelé que l’école doit préparer les élèves à vivre dans « un environnement numérique complexe ».
Le prince Albert II a choisi de renforcer le programme Extended Monaco, et de faire du numérique la nouvelle pierre angulaire de l’économie monégasque.

“Rhôooooooooo!”

Vous utilisez un AdBlock?! :)

Vous pouvez le désactiver juste pour ce site parce que la pub permet à la presse de vivre.

Et nous, on s'engage à réduire les formats publicitaires ressentis comme intrusifs.

Monaco-Matin

Un cookie pour nous soutenir

Nous avons besoin de vos cookies pour vous offrir une expérience de lecture optimale et vous proposer des publicités personnalisées.

Accepter les cookies, c’est permettre grâce aux revenus complémentaires de soutenir le travail de nos 180 journalistes qui veillent au quotidien à vous offrir une information de qualité et diversifiée. Ainsi, vous pourrez accéder librement au site.

Vous pouvez choisir de refuser les cookies en vous connectant ou en vous abonnant.