Emmanuel Macron sera réélu, quoi qu’il arrive

Le Monaco Economic Board accueillait, ce vendredi au Méridien, l’économiste Jean-Pierre Petit pour une conférence sur les risques de 2020, qu’ils soient politiques ou économiques

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Propos recueillis par Thibaut Parat Publié le 16/09/2019 à 10:03, mis à jour le 16/09/2019 à 10:03
Jean-Pierre Petit, économiste, au milieu des entrepreneurs monégasques du Monaco Economic Board.
Jean-Pierre Petit, économiste, au milieu des entrepreneurs monégasques du Monaco Economic Board. Cyril Dodergny

Jean-Pierre Petit est un économiste qui cause sans tabou, ni langue de bois. Limpide comme de l’eau de roche, le propos du président des Cahiers verts de l’économie (1) a été distillé lors d’une conférence pointue, organisée par le Monaco Economic Board et Ascoma Jutheau Husson (2), devant les entrepreneurs de la Principauté. Sur le thème « Les risques de 2020 : politiques et/ou économiques », le fin spécialiste a livré ses analyses aiguisées, empreintes d’humour, parfois d’ironie. Un ton libre et un art certain de la rhétorique qui a tenu en haleine l’auditoire.

La présentation fleuve a, pêle-mêle, englobé des sujets brûlants du monde actuel : la crise avec l’Iran, la guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis, le Brexit, la politique italienne… Autant de sujets susceptibles de déstabiliser les marchés. « Comme dans les films, ça commence plutôt mal et ça finit plutôt bien, a prévenu l’orateur, tout en redéfinissant l’intitulé du sujet.

« Ça ne se limite pas aux risques politiques et économiques stricto sensu. Il y a une configuration complexe et multiforme de risques auxquels on va faire face au cours de cette décennie et des prochaines. C’est pour cela que je parle de risques contemporains. Le risque économique n’est que la conséquence d’autres risques exogènes, extérieurs aux enchaînements macroéconomiques : politiques, sociaux, migratoires, climatiques, vieillissement, géopolitiques… »

Extraits de son analyse.

A-t-on des raisons d’être

optimistes pour le futur ?

« Sur le plan politique, sachant que les cinq dernières récessions mondiales sont parties des États-Unis, sachant qu’il y a une élection présidentielle là-bas en 2020 et qu’historiquement la quasi-totalité des présidents s’étant représentés dans un contexte de récession n’ont pas été réélus, connaissant l’activisme de Donald Trump, il fera tout, pour lui, pour éviter une récession. Compte tenu des indicateurs avancés macroéconomiques et la situation politique, je pense qu’on évitera un retournement macroéconomique majeur. En revanche, il est vrai que la croissance économique sera moyenne sur les six prochains mois, proche de 3 %. »

La guerre économique

sino-américaine

« Le risque géopolitique, en 2019-2020, se concentre principalement sur les tensions commerciales et les initiatives prises par Donald Trump sur les droits de douane avec une focalisation particulière sur la Chine. C’est ce qui fait le plus peur ! La Chine est visée car c’est le pays le plus mercantile au monde depuis quatre décennies. Sur le plan de l’Histoire, quand vous avez une puissance établie et une ascendante qui vient la challenger, ça se passe rarement bien (...) ça va durer des années ! Je crois qu’il y aura un accord mais il ne sera que partiel et transitoire. »

Le Brexit

« J’admire la résistance de Boris Johnson. Il prend une baffe tous les jours depuis qu’il est Premier ministre du Royaume-Uni. Si je reviens à Monaco dans dix ans, on parlera encore du Brexit. C’est un feuilleton qui va durer des années. On va proroger, on va procrastiner sur cette affaire puisque personne ne sait comment on sort d’une union douanière. »

Sur la politique italienne

« Je prédis que la durée de ce nouveau gouvernement va être inférieure à celle du précédent (...) La gouvernance européenne a eu une attitude assez arrogante, inutilement sacrificielle, punitive à l’égard de ce grand pays européen, fondateur de l’Union Européenne. Cette attitude, initiée principalement par les dogmes traditionnels allemands, ont été très négatifs non seulement pour la croissance économique mais pour la situation politique en Europe. Ce n’est pas comme ça que l’on s’adresse à un pays européen. Je trouve qu’une certaine forme de confrontation avec l’Allemagne est nécessaire sur le plan notamment des équilibres budgétaires, des réformes structurelles. De ce point de vue, l’Italie a plutôt joué un rôle précurseur à cet égard. »

Que doivent surveiller les entrepreneurs monégasques, principalement des banques et l’immobilier, sur le plan mondial ?

« Quand vous voulez gagner de l’argent, il faut mieux avoir des actions sinon c’est difficile. Ou alors il faut abandonner la liquidité et investir sur le long terme, dans les infrastructures, le “private equity”. Les actions sont l’actif le plus représentatif de l’appétit ou de la version risque. L’immobilier n’est pas un mouvement mondial. Il y a une variable clé qui fait monter ou baisser l’immobilier au niveau mondial : c’est le taux d’intérêt. Il y a des situations spécifiques en termes de prix, de liquidités, de spécificités réglementaires et techniques qui font que les marchés immobiliers sont un peu dispersés. Les investisseurs, ici à Monaco, sont avant tout intéressés par ce qu’il se passe au niveau mondial, même si Monaco est un îlot de prospérité avec beaucoup de digues économiques, réglementaires, qui devraient permettre au pays de rester à l’écart des mouvements les plus violents »

Son avis sur Macron

« Emmanuel Macron sera réélu quoi qu’il arrive, alors qu’on le conspuait dans la rue. Je persiste sur cette idée. Son actif principal, c’est la chance. Il a du bol. Il a Boris Johnson, il a Angela Merkel que personne n’écoute, Giuseppe Conte ne va pas durer longtemps en Italie, Pedro Sánchez n’a aucune majorité en Espagne. Dans le camp occidental, depuis de Gaulle, on n’a pas vu un Français au-dessus du lot. La Ve République, c‘était un peu la loi des rendements décroissants… »

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