"C’est d’une violence inouïe!": Un plan social nécessaire au Fairmont de Monaco, son directeur général s'explique

Le directeur général du Fairmont, Pierre-Louis Renou, plaide que le plan social lancé dans son établissement est nécessaire face à une situation financière et commerciale préoccupante.

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CEDRIC VERANY cverany@monacomatin.mc Publié le 22/01/2021 à 10:34, mis à jour le 22/01/2021 à 10:41
L’hôtel de 617 chambres est le plus grand du pays. Photo archives Monaco-Matin

Il a pris les rênes de l’hôtel en novembre dernier, en plein rebond de la crise sanitaire. Trois mois après son arrivée, le directeur général du Fairmont Monte-Carlo, Pierre-Louis Renou, lance un plan social dans son établissement, annoncé le 15 janvier dernier à ses employés.

Les modalités de ce plan de départ volontaire tablent sur le départ de 72 femmes et hommes parmi les 411 salariés de l’hôtel. Une nécessité selon le patron: "Les effets directs de la crise, en termes d’impacts financiers et commerciaux, nous avons commencé à le sentir dès le mois de mars 2020. Mais nous avons pris notre temps, grâce, fort heureusement, à l’aide considérable du gouvernement qui nous a permis de prendre une respiration et nous projeter à court et moyen terme. Malheureusement, les mois passent et les conséquences de la crise sont beaucoup plus profondes que nos estimations. Les réservations de notre carnet groupe pour 2021 sont inférieures de 80% à celles de l’an passé, c’est d’une violence inouïe! On paye aujourd’hui le fait que l’activité commerciale n’a pas eu lieu. Il nous faut ajuster les dimensions de notre entreprise pour pouvoir passer ces années qui se présentent de manière très délicate et protéger notre hôtel et nos équipes".

Une perte de plusieurs millions d’euros

La plaidoirie est donc celle de réduire la voilure pour passer la tempête. Une situation que les délégués du personnel estiment "immorale" [Monaco-Matin du 19 janvier], avançant le bénéfice de 8,4 millions d’euros réalisé par le Fairmont Monte-Carlo en 2020.

"Derrière ces résultats d’exploitation nous avons des frais financiers, des emprunts, des amortissements, des assurances qui font que cette année nous perdons en fait plusieurs millions d’euros sur l’exercice 2020 et nous devrions a priori en perdre encore plus en 2021", répond Pierre-Louis Renou.

"Nous sommes conscients de la qualité de la ressource de notre établissement, de ce que nous devons aux employés et nous avons attendu d’être dans ces circonstances pour décider ce plan de départ volontaire ouvert à tous face à une pyramide des âges qui devrait nous permettre de répondre en grande partie à ce que nous avons besoin pour limiter les pertes financières".

Le directeur général entend faciliter les échanges pour les salariés avec les diverses compétences pour calculer leur situation. Mais aussi ouvrir la porte à la mutation dans le réseau hôtelier tentaculaire du groupe Accor auquel appartient l’hôtel.

Et également ordonner un plan de reclassement ambitieux avec des formations pour ceux qui le souhaitent en interne. Son credo affiché: rester ouvert aux discussions pour générer le moins de casse.

"J’ai voulu être extrêmement transparent, j’ai présenté les comptes aux délégués du personnel. Et j’ai voulu que ce plan soit ouvert à tous pour limiter la casse sociale en demandant aux délégués de travailler à des propositions pour accompagner la situation. Et c’est ce que nous sommes en train de faire".

Aujourd’hui, avec la non-présence en janvier du Festival international du cirque et du Rallye historique, l’hôtel est au plus bas régime. Seul le restaurant Saphir 24 est ouvert et les salariés sont toujours en partie au CTTR.

"Si on devait adapter nos structures au business actuel, ce n’est pas 72 postes qu’on enlèverait, mais bien plus", estime Pierre-Louis Renou.

"On ne retrouvera pas notre activité en quelques mois"

Pessimiste sur les mois à venir? "On sait que nous ne retrouverons pas notre niveau d’activité en quelques mois mais plutôt en années. Des réservations semblent poindre fin 2021, mais il faut rester prudent. En mars 2020 par exemple, nous devions accueillir un énorme congrès représentant plusieurs centaines de milliers d’euros de recettes. Le client a reporté au mois de novembre 2020, tous les partenaires ont joué le jeu. En novembre dernier, le congrès a à nouveau reporté à mars 2021. Et l’événement est finalement annulé, le client a jeté l’éponge. Qui aurait pu penser quand on a annulé en mars 2020 qu’on serait encore dans cette situation un an plus tard?"

Pour l’heure, les discussions doivent se poursuivre, à raison de deux réunions hebdomadaires entre les représentants du personnel et la direction de l’hôtel. Et les délégués du personnel du Fairmont Monte-Carlo doivent être reçus au Conseil national, ce vendredi.

Le directeur général est en fonction depuis le mois de novembre. Photo DR.

"Nous préparons l’établissement pour demain"

Le projet est envisagé depuis plusieurs mois. Et malgré la crise de la Covid-19, la volonté est intacte d’entreprendre un vaste programme de rénovation au sein du Fairmont Monte-Carlo.

À l’instar de l’hôtel Métropole qui a entrepris fin septembre sa transformation, l’ambition du groupe Accor et de la marque Fairmont est toujours de lancer ce chantier qui devrait s’étendre jusqu’en 2023. Objectif: refaire la totalité de l’hôtel, chambres et restaurants compris.

"Nous voulons préparer l’hôtel pour demain, en construisant l’avenir et en repositionnant notre établissement davantage sur le tourisme familial, le loisir, la décontraction et l’entertainment. Et pourquoi pas accueillir des concerts, des galas, des manifestations sportives, des animations pour les enfants. Notre volonté est de rendre notre hôtel plus attractif et nous travaillons sur ces points en suivant la volonté de nos propriétaires", confirme Pierre-Louis Renou.

"Ce que nous voulons, c’est muscler nos atouts, et peut-être aussi investir pour rendre cet hôtel plus méditerranéen".

Le secteur restauration dans le viseur du plan

Pierre-Louis Renou l’a confirmé: le plan ordonné par la direction du Fairmont s’adresse tout particulièrement au secteur de la restauration, notamment pour les équipes qui organisent des banquets pour le tourisme d’affaires. "Ce sont des métiers où nous pensons qu’il y aura moins d’activité pour les mois et les années à venir", complète le directeur général.

En ligne de mire: la marque de traiteur Private Dining, développée depuis plusieurs années par le Fairmont.

Les changements de poste envisagés

"On ne s’attend pas à ce que ce business revienne du jour au lendemain. Ces métiers-là sont touchés et ceux qui vont autour de ça, dont les commerciaux qui vendent ces produits" ajoute-t-il, conscient de toucher à un secteur fort de l’hôtel.

"Si on prend un risque comme celui-ci, c’est qu’on est vraiment dans le besoin, ce n’est pas de gaieté de cœur". Pour certains métiers du Private Dining, notamment des postes tertiaires, la direction de l’hôtel espère que le changement de poste puisse séduire certains salariés.

"Les commerciaux par exemple qui vendent les services du tourisme d’affaires, pourraient basculer vers la réservation pour le tourisme de loisirs, où nous espérons que l’activité reprenne plus vite. Ça peut être temporaire ou ouvrir de nouvelles carrières et nous accompagnerons les formations en ce sens".

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