2020, quelle santé pour l’économie?

Quelles sont les perspectives économiques pour 2020? Les analystes de la Banque Postale prévoient une année apaisée mais aussi attentiste en raison des élections municipales.

Article réservé aux abonnés
Karine Wenger Publié le 20/01/2020 à 10:04, mis à jour le 20/01/2020 à 17:13
De gauche à droite. Les spécialistes de la Banque postale: Olivier Touchet, directeur Secteur public Méditerranée, Stéphane Alessandroni, directeur régional Méditerranée, Luc-Alain Vervisch, directeur des études, et Alain Henriot, responsable des études économiques. Photo K.W.

Tensions irano-américaines, sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne le 31 janvier, élections municipales en mars… Que nous réserve l’année 2020? Quelles sont les attentes des marchés? C’est à cet exercice de style que se sont livrés Alain Henriot et Luc-Alain Vervisch, experts de la Banque Postale venus à Nice présenter les perspectives économiques à leurs clients professionnels et publics.

Accalmie

«2019 a été très chahutée par les tensions commerciales sino-américaines et les interrogations concernant le Brexit», rappelle Alain Henriot, responsable des études économiques à la Banque Postale. Ces deux éléments ont pesé sur la conjoncture mondiale et laissé des traces notamment dans la sphère industrielle. «La production industrielle allemande est en recul de 5%, presque autant que lors de la crise financière de 2008.»

Le secteur tertiaire, pour sa part, résiste mieux et le marché du travail a été encore assez dynamique aux États-Unis et en Europe.

L’année s’est terminée sur une note plus positive : un accord ayant été trouvé avec Londres, le Brexit devrait moins peser sur l’économie mondiale en 2020. «L’intensité du feuilleton sera moindre, analyse Alain Henriot. Même s’il va désormais falloir définir les nouveaux contours de la relation commerciale entre le Royaume-Uni et l’UE, il n’y a pas de date couperet.»

Idem pour la crise commerciale sino-américaine qui s’est apaisée la semaine dernière avec la signature d’un accord. Pour autant, module l’expert, «Les deux puissances conserveront toujours une certaine défiance l’une envers l’autre car le leadership économique et politique est en jeu.»

Ça va mieux d’un côté et ça empire de l’autre comme le prouvent les tensions actuelles entre les USA et l’Iran. 2020 commence donc mieux mais si les enquêtes de conjoncture montrent une stabilisation de l'activité industrielle depuis l’été, le rebond se fait attendre. «Pour la zone euro, on restera sur un rythme de croissance de 1% l’an, précise Alain Henriot. Le marché du travail perd en dynamisme. Côté exportations, on peut s’attendre à un raffermissement du commerce mondial.»

Résilience

La France, elle, a fait preuve de résilience face à un environnement international adverse. «On fera mieux que l’Allemagne et la zone euro d’un point de vue croissance en 2019.»

Un phénomène dû selon Alain Henriot au gain de pouvoir d’achat dont ont bénéficié les ménages. Gain lié au dynamisme du marché du travail, à une inflation restée faible, à une petite progression des salaires et à la crise des Gilets jaunes. «Les mesures adoptées par le gouvernement ont redonné du pouvoir d’achat aux ménages.»

Autres éléments qui ont soutenu l’activité: l’investissement avec la dernière phase du CICE et la nouvelle mesure de baisse des cotisations sociales employeurs. «Pour les entreprises françaises, 2019 a été une bonne année. Elles ont anticipé leurs dépenses, ce qui veut dire qu’on aura peut-être moins d’investissement cette année.» D’autant que les années d’élection sont réputées pour être attentistes. Que l’on se rassure: il y aura quand même de la consommation et de l’investissement.

Après 2019 qui a vu la création de 280 000 emplois, le marché du travail s’annonce moins dynamique avec une stabilisation du taux de chômage et une modération des créations d’emploi. La croissance devrait rester dans le même ordre de grandeur que 2019: 1,3%.

Quel impact sur les collectivités locales?

Le 15 mars, on ira voter pour élire son maire. Des élections loin d’être anodines car ayant des répercussions sur l’économie, notamment celle des collectivités locales, comme l’explique Luc-Alain Vervisch, directeur national des études de la Banque Postale.

Même si «Les finances du monde local n’ont jamais été aussi bonnes qu’en 2019.»
Une excellente santé que l’analyste impute aux efforts de gestion considérables «provoqués par l’État avec la baisse des dotations et ses exigences de maîtrise de fonctionnement à hauteur de 1,2 % par an.» Mais pas que… «Au début de la décennie, les collectivités ont, elle aussi, fait de gros efforts pour améliorer la commande publique et le pilotage de la dépense sociale.»

«Il y aura une période d’observation en début de mandat»

Il en a résulté en 2019 un autofinancement record qui fait suite à une forte chute des investissements notée en 2014 en début de mandat. «C’est un cycle classique, estime Luc-Alain Vervisch. Cette diminution s’explique par l’arrivée des nouvelles équipes, la concrétisation technique et juridique des nouveaux projets.»
Toutefois, l’investissement public pour 2014-2020 aura été inférieur de 17 Mds€ à celui des deux mandats précédents. «On peut donc s’interroger sur le niveau que les nouvelles équipes vont se fixer pour maintenir en état le patrimoine local existant qu’il concerne les hôpitaux, le logement social, le réseau routier, les ouvrages d’art ou cultuels…»
Et d’anticiper: «Il devrait y avoir un rattrapage sur les cinq à six années à venir, précisément parce que la situation financière le permet et que les taux d’intérêt sont faibles et le resteront.»
Deux éléments d’incertitude risquent pourtant de venir jouer les trouble-fêtes. «Dans sa trajectoire de redressement des comptes publics, l’État prévoit un désendettement des collectivités locales mais à une hauteur qui ne nous paraît pas compatible avec les besoins en investissement. Il n’y a que les nouvelles équipes qui pourront y répondre d’ici douze à dix-huit mois.»

Stratégie fiscale

La seconde interrogation porte, quant à elle, sur les effets de la suppression d’ici 2023 de la taxe d’habitation sur toutes les résidences principales. Les collectivités locales à qui sera transféré en grande partie l’impôt sur le foncier bâti vont faire face à une question de stratégie fiscale. Si l’électorat est sensible au taux de taxe d’habitation, il l’est moins sur celui du foncier bâti car une partie des propriétaires (entreprise, bailleur social, bailleur individuel) ne vote pas.

«Les collectivités communales et intercommunales utiliseront-elles la pression fiscale comme moyen de développement de leurs actions? Ou bien seront-elles plus prudentes pour éviter que le lobbying des entreprises et/ou des bailleurs sociaux qui estimeraient excessive la pression fiscale sur la propriété?»
Dans tout cela, un point positif ressort pour les collectivités: les Alpes-Maritimes ont un pourcentage de résidences secondaires plus élevé que la moyenne nationale, donc une ressource fiscale supplémentaire.
Autre question que devront se poser les maires: comment maintenir un lien avec l’habitant s’il ne s’acquitte plus de la taxe d’habitation? Surtout, si ce dernier s’attend à une même qualité de service public. «C’est un vrai enjeu pour le mandat.»

Là encore, Luc-Alain Vervisch prévoit douze à dix-huit mois d’observation, période durant laquelle les chantiers déjà lancés continueront. «Un redémarrage devrait avoir lieu en 2023 car l’état du patrimoine local le nécessite et qu’il y a des territoires en développement qui ont besoin d’équipements neufs, d’écoles supplémentaires…»

“Rhôooooooooo!”

Vous utilisez un AdBlock?! :)

Vous pouvez le désactiver juste pour ce site parce que la pub permet à la presse de vivre.

Et nous, on s'engage à réduire les formats publicitaires ressentis comme intrusifs.

Monaco-Matin

Un cookie pour nous soutenir

Nous avons besoin de vos cookies pour vous offrir une expérience de lecture optimale et vous proposer des publicités personnalisées.

Accepter les cookies, c’est permettre grâce aux revenus complémentaires de soutenir le travail de nos 180 journalistes qui veillent au quotidien à vous offrir une information de qualité et diversifiée. Ainsi, vous pourrez accéder librement au site.

Vous pouvez choisir de refuser les cookies en vous connectant ou en vous abonnant.