Le shopping, l'écologie, l'éducation, les cons...: les thèmes qui sont "urgents" à penser pendant les Rencontres Philosophiques de Monaco
Après avoir abordé l’écologie ce mardi, la semaine PhiloMonaco se penche sur l’éducation et l’enfance ce mercredi. Un programme dense et intense où chacun trouve chaussure à son pied.
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Thomas Michel et Anne-Sophie CoursierPublié le 14/06/2023 à 10:02, mis à jour le 14/06/2023 à 09:30
"On essaye de faciliter les possibilités de rencontres", annonce Charlotte Casiraghi. Photo Cyril Dodergny
Parce que la communication aseptise notre quotidien. Parce que la langue française est pourtant riche, que les mots ont un sens et qu’ils guident notre pensée. Parce qu’il y a urgence à remettre le fond au-devant de la forme, à être collectivement responsable, la semaine PhiloMonaco invite les Monégasques et résidents à penser ensemble jusqu’à dimanche. Penser maintenant pour bâtir demain. Réfléchir avec légèreté sur des thématiques comme la chance, le shopping ou encore les cons, ce week-end. Réfléchir avec grand sérieux tout au long de la semaine sur les questions de l’écologie, l’éducation, le soin et les femmes.
"Ces quatre thèmes sont des questions qui s’imposent à nous, des questions littéralement inévitables. On ne peut pas aujourd’hui ne pas se poser ces questions urgentes et politiques car elles intéressent la vie de la cité", défend le philosophe et membre fondateur des Rencontres philosophiques, Raphaël Zagury-Orly.
"À Monaco, on n’a plus peur de la philo"
"Des thèmes philosophiques ancrés dans les préoccupations de chacun", abonde le président du jury des Rencontres philosophiques, Robert Maggiori, révélant l’intérêt y compris de thèmes "bizarroïdes" de prime abord. "Le shopping, il y a des philosophes qui en ont parlé comme Max Weber et Walter Benjamin. Nous voulions savoir qu’est-ce qui se passe dans le shopping? Ce n’est pas seulement l’acte d’achat, c’est bien plus que cela. Il y a de la déambulation, de la flânerie, de la rencontre, du désir, de la déception…"
Samedi, lors de la même séance de discussions au salon Excelsior de l’Hôtel Hermitage, il sera également question de "courtoisie". "C’est d’abord le langage qu’on exigeait à la cour, rappelle Robert Maggiori. On demandait aux courtisans d’enlever de leur langage comme de leurs vêtements tout ce qui pourrait froisser le roi. On n’avait pas le droit de mettre des aspérités. Et puis il y a cette phrase cardinale d’Emmanuel Levinas: "Après vous, je vous en prie". Cela paraît être une courtoisie mais c’est le fondement d’une morale, de la morale même."
De la place du marché lors des Matinales (9 h-10) à la nouveauté des déjeuners-philo avec un auteur au TPG - en association avec la Médiathèque -, en passant par les émissions sur France Culture ou les conversations au Yacht-club et à l’Hôtel de Paris, c’est le tout-Monaco que la présidente des Rencontres philosophiques, Charlotte Casiraghi, entend infuser de philosophie. "On essaye de faciliter les possibilités de rencontres, proposer suffisamment de sujets pour que les personnes prennent 1h30 dans la semaine pour venir à une rencontre."
"Au début c’était compliqué, on nous prenait pour des Martiens, rembobine Robert Maggiori. On voit la différence avec il y a 3 ou 4 ans". "à Monaco, on n’a plus peur de la philo", ajoute Raphaël Zagurly-Orly, qui cite lui aussi Levinas pour résumer la force de la philosophie face au défi d’un temps devenu rare. "La philosophie est l’exercice de la patience. C’est une certaine offrande du temps de la réflexion."
La Matinale a pris place hier matin au cœur du marché de la Condamine.Photo Anne-Sophie Coursier.
Le public s’empare de la matinale à la Condamine
Ce mardi matin, la place d’Armes avait pris des airs d’agora de cité grecque. Dès 9 h, entre les différents étals du marché de la Condamine et les allées et venues du public, Charlotte Casiraghi, Robert Maggiori et Raphaël Zagury-Orly ont lancé la semaine PhiloMonaco par une première matinale sur le thème de l’écologie. Descendu à pied depuis le Palais, le prince Albert II, dont la Fondation participe à l’événement, a ravi sa nièce par sa présence. La princesse Caroline ayant elle aussi pris place au premier rang.
"Il faut toujours mener des actions de sensibilisation envers l’écologie et embrasser le public le plus large possible, toutes générations confondues, a rappelé le souverain. Il faut sans cesse répéter ce message important concernant notre environnement et toujours se baser sur les données scientifiques, qui sont aujourd’hui très claires le concernant. Il reste tout aussi important de ne jamais oublier les fondamentaux. Ainsi, une réflexion plus approfondie peut nous amener à prendre conscience de tout cela de manière posée. Et, avec cette prise de conscience, agir en prenant des mesures ayant de la durabilité."
La maire de Monaco, Georges Marsan, a lui aussi souligné l’importance de ce rendez-vous et du lieu où il se tient qui, selon lui, reste l’endroit idéal pour faire circuler la parole des philosophes. "Le marché de la Condamine est le cœur battant de la cité, son cœur populaire."
À peine le débat était-il lancé - "Que peut apporter la philosophie à l’écologie?" -, que les premiers passants étaient interpellés. Si Florianne, aujourd’hui âgé d’un peu plus de 70 ans, vient spécialement du Mans depuis huit ans pour se nourrir et ouvrir son esprit aux sujets qui touchent l’humanité ; plus loin, trois Monégasques et Enfant du pays disent découvrir la chose. Un coup d’œil au riche programme de la semaine et elles se donnaient rendez-vous ce mercredi matin pour prendre leur café durant l’heure de débat sur le thème de l’éducation.
Poussée par sa fille, qui réside en Principauté, Bozenna compte, quant à elle, participer après avoir épluché le programme qu’elle vient d’obtenir.
Pour ce premier jour, le public a saisi au vol le principe de cette matinale. Avec lui, la réflexion collective est en marche.
La décla'
"Si la philosophie reste dans des cercles académiques, elle dépérit. D’ailleurs, il y a de moins en moins d’étudiants à l’Université. Il fallait pour la faire revivre de façon sociale et amicale, de façon philo-sophique, la déployer dans la cité. Nous avons répondu à une urgence. Ce n’est pas par philanthropie que nous nous sommes dit que nous allions philosopher devant tout le monde. Nous avons été saisis, requis. Pourquoi? Un exemple: nous estimons que la vérité est menacée du point de vue social, je le dis aussi en tant que journaliste. Il faut protéger la vérité, la chercher.", Robert Maggiori, philosophe, journaliste à Libération et membre-fondateur des Rencontres philosophiques sur France Culture.
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