Quand on lui demande de raconter son parcours professionnel, Lolita Abraham sourit. "Je suis née dans le chaudron du textile", plaisante-t-elle, évoquant son père qui faisait commerce dans les vêtements. Bon sang ne saurait mentir, elle lui emboîte le pas, très jeune.
En s’installant en Chine pour une décennie proactive dans laquelle elle lance une marque de fringues pour enfants et développe des concepts marketing pour de grandes boîtes. "À côté, je tenais un blog où je racontais mes expériences, ce qui m’a fait prendre conscience de l’impact des réseaux sociaux".
Arrivée à Monaco en 2017, Lolita Abraham sort de sa valise un concept novateur : les Influencer Awards, une cérémonie récompensant les cadors de la discipline. "Nous avons été le premier événement de ce genre dans le monde", rappelle-t-elle, fière de ses deux éditions stoppées par le Covid.
La pandémie la pousse à réfléchir à un nouveau concept. Qui se concrétise via E-idols, la première agence internationale de marketing d’influence basée à Monaco. "J’ai imaginé entre les marques et les créateurs de contenus, quelque chose qui n’existait pas en Europe : une agence de marketing d’influence. Notre promesse est d’être, pour les marques, une porte pour toucher le monde. Et de leur éviter d’avoir une agence en Espagne, une autre en Italie, une troisième en Angleterre. Notre agence monégasque permet de travailler sur tous les marchés. En apportant notre expertise, en trouvant les bons acteurs, les bons créateurs de contenus qui peuvent apporter le bon retour sur investissement". Interview.
Depuis deux ans, avec E-idols, vous êtes un point de contact entre des marques et des influenceurs, mais vous gérez aussi, votre propre réseau de créateurs de contenus désormais ?
En effet, nous avons ouvert un nouveau département de gestion de talents en exclusivité et nous en comptons déjà une cinquantaine. Ce sont des talents originaires de France, de Belgique, du Royaume-Uni, des États-Unis, des Pays-Bas, d’Espagne, d’Italie et évidemment de Monaco avec qui nous avons une exclusivité et nous agissons comme des agents pour eux. En leur apportant un professionnalisme, en les cadrant au niveau législatif, en les responsabilisant sur leur communication et leur impact. Notre volonté est de prôner du professionnalisme dans ce métier de créateur de contenus qui a été secoué ces derniers temps avec les gens de la téléréalité.
Encadrer des influenceurs, c’est aussi un nouveau métier, d’où provient votre équipe ?
En effet, c’est un nouveau métier pour lequel nous formons des talents manager. Aujourd’hui l’agence compte vingt salariés, c’est un succès dont je suis fière. Des gens ont envie de rejoindre ce monde de l’influence pour travailler avec des influenceurs.
Vos racines professionnelles sont dans le marketing. Aujourd’hui, une marque qui communique doit passer obligatoirement par les réseaux des influenceurs ?
Oui ! C’est inenvisageable de faire de la communication avec une marque sans passer par l’influence désormais. Toute personne qui a un impact sur une communauté peut jouer ce rôle d’influence pour une marque. Il faut juste trouver le bon profil. Et un annonceur peut voir précisément ce que lui rapporte son investissement en termes financiers et en termes d’audience. Auparavant, en payant une publicité dans un magazine, on savait plus ou moins, on ne pouvait pas certifier qu’autant de personnes de tel âge ont eu le magazine en main. Là on sait combien de personnes, dans combien de pays, leur tranche d’âge. On a une vraie maîtrise.
Ces métiers d’engagement sur les réseaux sociaux comptent beaucoup d’aspirants mais peu d’élus qui réussissent. Comment sélectionnez-vous vos créateurs de contenus ?
Nous étudions d’abord le profil pour savoir si c’est un réel créateur de contenus. Nous ne prenons pas quelqu’un qui commence de zéro mais déjà des gens qui ont un engagement, une audience, une crédibilité. C’est très important car on travaille avec des marques connues et qui nous font confiance. On regarde beaucoup les statistiques, avec des outils pour analyser qui peut entrer chez nous.
Ces activités attirent beaucoup la jeune génération, quels conseils pouvez vous donner à quelqu’un qui cherche à se construire une communauté sur les réseaux sociaux ?
Ce milieu, il me semble, peut être attractif aussi bien devant que derrière l’écran. Il faut pouvoir s’exprimer face caméra, se prendre en photo tous les jours. Mais il n’y a pas que ce côté-là qu’un jeune intéressé par l’influence pourrait aller chercher. Il y a ce qu’on fait en agence, accompagner, conseiller, faire grandir ces talents. C’est là où sont les nouveaux métiers. Nous allons commencer à former des gens pour les habituer à ce métier et pour accompagner plein de jeunes. Mon souhait est de faire grandir l’agence, à Monaco bien sûr mais avec des succursales dans d’autres pays. On travaille actuellement vers le Japon et Hong Kong avec des équipes sur place.
Trouve-t-on des spécificités de nationalité entre un influenceur de Monaco, de Londres ou de Tokyo ?
De manière générale, ils ont les mêmes codes, car ils sont usagers des mêmes plateformes que ce soit TikTok, YouTube et Instagram principalement sauf en Asie.
Ensuite, plus que la nationalité, je dirais que c’est la personnalité du talent qui le rend unique. Il ou elle présente les choses comme elle le ressent. Ce ne sont pas des acteurs, ils donnent leur avis, informent leur communauté. Et nous ne sommes pas là pour leur dicter un texte, mais plutôt les conseiller.
Vous avez choisi d’implanter votre agence sur la Côte d’Azur et précisément à Monaco. La Riviera est selon vous, une terre d’influence ?
Monaco est une vitrine internationale, un endroit qui fait rêver. Je ne pense pas qu’on puisse faire une agence internationale depuis Paris, Bruxelles ou Milan. Monaco s’y prête complètement, on y retrouve de nombreuses nationalités. Et d’être les seuls à faire ça en Principauté, ça nous apporte beaucoup.
Les Influencer Awards de retour
La pandémie avait eu raison de la troisième édition. Mais les Influencer Awards ne sont pas morts ! "Nous sommes de retour pour une troisième édition", promet leur créatrice, Lolita Abraham. L’équipe étudie plusieurs dates dans le calendrier de l’automne monégasque pour faire venir le maximum de créateurs de contenus.
Comme lors des deux premières éditions. "Notre ambition est de faire vivre différentes expériences en Principauté aux talents présents avant un grand tapis rouge et la cérémonie le dernier soir". Cérémonie qui devrait – les pourparlers sont en cours – être diffusée en prime time sur une chaîne de télévision.
En parallèle, l’agence E-idols entend renforcer sa présence sur l’événement phare de la saison monégasque : le Grand Prix de Formule 1. En mai dernier les équipes avaient privatisé un rooftop avec vue sur le circuit. "Nous avons proposé un événement très fort ou se sont croisés des célébrités, des représentants de marques, des influenceurs comme Camila Coelho qui cartonne aux États-Unis ou le Français Michou. Et nous comptons répéter l’expérience chaque année".
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