L'autre arme secrète de la guerre en Ukraine: le documentaire

Six réalisateurs et réalisatrices ukrainiens ont été à l'honneur cette semaine du Festival international du film documentaire (Fipadoc) à Biarritz.

La rédaction (avec AFP) Publié le 27/01/2023 à 10:52, mis à jour le 27/01/2023 à 10:38
La photographe et réalisatrice Mila Teshaieva. DR

Ils sont en mission pour témoigner de la guerre qui fait rage depuis un an dans leur pays: six réalisateurs et réalisatrices ukrainiens ont été à l'honneur cette semaine du Festival international du film documentaire (Fipadoc) à Biarritz, dans le sud-ouest de la France.

Roman Bondarchuk a quitté Kherson pour la Grande-Bretagne, avec sa famille. "Physiquement, on peut être n'importe où mais mentalement nous sommes toujours en Ukraine, on ne peut pas couper", souffle-t-il. 

Venu avec un film réalisé en 2015, Ukrainian Sheriffs, qui évoque l'annexion de la Crimée par la Russie l'année précédente, le réalisateur de 41 ans dénonce une guerre "cruelle", "très bien préparée au sein de la société russe qui croit vraiment que l'Ukraine n'est pas un pays indépendant et qu'elle doit être effacée en tant que nation".  

En suivant le quotidien de deux shérifs d'un village du sud-est de l'Ukraine, au bord de la mer Noire, il raconte une vie qui bascule et les premières réquisitions d'hommes envoyés sur le front.

"Cette guerre aujourd'hui est le fait d'un système, pas seulement celui de Poutine. Il y a beaucoup d'autres démons en Russie, qui peuvent faire perdurer ce cauchemar, comme Evguéni Prigojine (chef du groupe paramilitaire Wagner, NDLR)", estime-t-il.

Directeur artistique d'un festival de films documentaires en Ukraine, Docudays UA, Roman Bondarchuk s'est engagé dans l'initiative "Ukraine War Archive" qui collecte, depuis le début de l'agression russe en février dernier, des preuves de présumés crimes de guerre "pour que les chercheurs, les avocats, les défenseurs des droits humains puissent les retrouver facilement".

"Tu ne peux pas en sortir indemne"

Photographe et réalisatrice, Mila Teshaieva a tourné When Spring Came to Bucha quelques jours après la découverte de centaines de corps de civils dans les rues de cette ville de la périphérie de Kiev, occupée par les Russes du 27 février au 31 mars 2022.

Habituée des sujets sur la mémoire, l'identité et les transformations au long terme de pays frappés par des guerres, elle a senti qu'elle "devait se rendre à Boutcha immédiatement". "Je pense que c'est un moment politique unique qui ne va pas transformer seulement les Ukrainiens mais aussi toute l'Europe."

Pendant deux mois, elle a tourné à Irpin, Boutcha et Borodyanka, confrontée aux limites de l'humain face à la découverte de l'horreur. 

"Tu ne peux pas en sortir indemne, je me sens tellement lourde d'avoir vu ces centaines de corps dans des sacs en plastique. Je me pose tout le temps la question que tout le monde se pose: pourquoi c'est arrivé, pourquoi ces gens?"

Son film, réalisé dans un temps record, a été diffusé en novembre pour la première fois lors du Festival international du film documentaire d'Amsterdam, où il a reçu un prix. "Il était très clair pour nous que nous devions montrer ce film le plus vite possible. J'ai rempli ma mission en un sens et maintenant c'est aux festivals de remplir la leur."

Parmi la sélection du Fipadoc figurait aussi Mariupolis 2, réalisé par Mantas Kvedaravicius et son épouse Hanna Bilobrova. Après l'exécution de son mari lors d'une évacuation à Marioupol, c'est elle qui a ramené et monté les images tournées dans la ville assiégée, pour livrer ce documentaire crépusculaire. 

Mais "il n'y a aucun festival ou prix qui vaille une vie", a souligné la réalisatrice à l'issue de la projection à Biarritz.

“Rhôooooooooo!”

Vous utilisez un AdBlock?! :)

Vous pouvez le désactiver juste pour ce site parce que la pub permet à la presse de vivre.

Et nous, on s'engage à réduire les formats publicitaires ressentis comme intrusifs.