Le président Volodymyr Zelensky a lancé mardi à l'ONU une violente diatribe contre Moscou accusée de "génocide" en Ukraine, tandis que son homologue américain Joe Biden appelait tous les pays à "se dresser contre l'agression" russe.
La déportation par la Russie de "dizaines de milliers" d'enfants ukrainiens est "clairement un génocide" a assuré Zelensky. "Nous connaissons les noms de dizaines de milliers d'enfants et avons des preuves pour des centaines de milliers d'autres kidnappés par la Russie dans les territoires occupés d'Ukraine et ensuite déportés", a-t-il dénoncé.
"Nous essayons de faire rentrer ces enfants à la maison, mais le temps passe. Qu'est-ce qui va leur arriver? En Russie, on leur apprend la haine de l'Ukraine, et tous les liens avec leurs familles sont coupés. C'est clairement un génocide", a dénoncé le président, sous les yeux de l'ambassadeur russe adjoint à l'ONU Dmitry Polyanskiy, présent à la table russe.
La Cour pénale internationale a émis un mandat d'arrêt contre Vladimir Poutine pour la "déportation illégale" de milliers d'enfants ukrainiens depuis février 2022. Des accusations rejetées par Moscou. Dans un discours plusieurs fois applaudi, le président a d'autre part fustigé le fait que la Russie détienne un arsenal nucléaire.
"Les terroristes n'ont aucun droit de posséder des armes nucléaires", a-t-il insisté. "La Russie se sert du prix des aliments (...) et de l'énergie nucléaire comme d'une arme", a-t-il également accusé. Il a enfin répété son appel à l'organisation d'un "sommet mondial de la paix". "Je vous invite tous -- tous ceux qui ne tolèrent aucune agression -- à préparer conjointement ce sommet", a-t-il martelé.
"Si nous laissons l'Ukraine être démembrée, l'indépendance des nations est-elle encore garantie?"
Dans la matinée, le président américain Joe Biden a fustigé la Russie qui "croit que le monde va se lasser et la laisser brutaliser l'Ukraine sans conséquence". "Si nous laissons l'Ukraine être démembrée, l'indépendance des nations est-elle encore garantie ? La réponse est non", a-t-il insisté, sous les applaudissements du président ukrainien et de la salle.
Il y a un an, Volodymyr Zelensky avait exceptionnellement été autorisé à intervenir via un message vidéo. Cette fois, il est là en personne, pour cette grand-messe annuelle où il a pris la parole en milieu de journée mardi, avant de participer à une réunion spéciale du Conseil de sécurité mercredi et partir pour Washington où il sera reçu à la Maison Blanche jeudi.
Les pays du sud plaident pour une solution diplomatique
Depuis l'invasion russe, une écrasante majorité de pays a adopté à l'Assemblée générale de l'ONU plusieurs résolutions soutenant l'Ukraine et son intégrité territoriale ou réclamant le retrait russe. Mais après un an et demi de guerre aux impacts en cascade sur le monde, notamment sur la sécurité alimentaire, certains pays du Sud plaident pour une solution diplomatique.
"Nous allons intensifier nos efforts pour mettre fin à la guerre grâce à la diplomatie et le dialogue, sur la base de l'indépendance et de l'intégrité territoriale de l'Ukraine", a lancé le président turc Recep Tayyip Erdogan, soulignant que "la guerre n'aura aucun vainqueur et la paix aucun perdant".
En Ukraine, "aucune solution ne sera durable si elle n'est pas basée sur le dialogue", a insisté de son côté le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva, qui doit s'entretenir mercredi avec Volodymyr Zelensky. "Beaucoup a été investi dans des armes et très peu dans le développement", a-t-il déploré.
A l'inverse de plusieurs puissances occidentales, le Brésil n'a jamais imposé de sanctions financières à la Russie ni accepté de fournir des armes à Kiev et le pays tente de se positionner, tout comme la Chine, en tant que médiateur.
"Je suis conscient que pour certains dirigeants, il est important de trouver une solution pacifique", a noté lundi le président du Conseil européen Charles Michel. Mais "pour que cette paix soit durable, elle doit respecter les principes" de l'ONU, a-t-il affirmé.
Améliorer le sort de l'humanité d'ici à 2030
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a, lui, peint un très sombre tableau d'un "monde sens dessus dessous", où les tensions géopolitiques "s'aggravent" et le réchauffement climatique "compromet le plus directement notre avenir". Symbole de cette "compilation" de crises, les inondations de Derna en Libye, "triste instantané de l'état de notre monde, emporté par le torrent des inégalités et des injustices, et paralysé devant les défis à relever", a-t-il déploré.
Les milliers de personnes qui ont perdu la vie "ont été victimes de plusieurs fléaux. Victimes d'années de conflit. Victimes du chaos climatique. Victimes des dirigeants, qui, là et ailleurs, n'ont pas su trouver la voie de la paix".
En prélude à l'Assemblée générale lundi, les pays en développement ont rappelé le reste du monde à ses promesses d'améliorer le sort de l'humanité d'ici à 2030, insistant notamment sur une réforme de l'architecture financière internationale. Une demande faite de façon répétée par Antonio Guterres, qui y voit une raison de la fragmentation du monde.
Hormis les Etats-Unis, aucun autre membre permanent du Conseil de sécurité (France, Royaume-Uni, Chine, Russie) n'est représenté au plus haut niveau. Des absences que certains diplomates voient comme un mauvais signe pour l'ONU.
Le président iranien Ebrahim Raïssi, lui, devait encore s'adresser mardi après-midi à l'Assemblée générale, alors que son pays et les Etats-Unis viennent de procéder à un rare échange de prisonniers en vertu d'un accord comprenant le transfert à Téhéran de six milliards de dollars de fonds gelés.
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