Le harpiste Xavier de Maistre en concert exceptionnel ce vendredi soir à Monaco

L’un des plus grands harpistes au monde donne ce vendredi un concert exceptionnel à l’Auditorium Rainier-III. Xavier de Maistre jouera un concerto pour piano de Mozart... à la harpe. Inédit.

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Anne-Sophie Coursier Publié le 02/02/2023 à 12:07, mis à jour le 02/02/2023 à 13:46
Pour Xavier de Maistre, la programmation culturelle de Monaco a une envergure internationale digne d’une grande capitale. La semaine consacrée à Monaco est, selon lui, exceptionnelle. Photo Jean-François Ottonello

C’est un concert exceptionnel que propose l’Orchestre philharmonique de Monte-Carlo vendredi, sur la scène de l’Auditorium Rainier-III, avec le concertiste et résident monégasque depuis 2014, Xavier de Maistre.

À 49 ans, le musicien est l’un des plus grands harpistes au monde. D’une humilité rare, ce soliste international, au parcours exceptionnel et atypique, n’est pas seulement talentueux. Il a placé son instrument au même rang que le piano ou le violon et a su réécrire des partitions pour les adapter à la harpe, devenant ainsi un concertiste réclamé par les plus grands orchestres philharmoniques pour son audace.

En 2017, Kazuki Yamada, directeur de l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo fraîchement nommé par sa présidente, la Princesse de Hanovre, fait appel à lui afin qu’il devienne le premier musicien en résidence de la Principauté de l’OPMC. Pour lancer son initiative, il fallait de l’excellence et de l’innovation. Xavier de Maistre était là.

Depuis, le soliste n’a pas eu l’occasion de jouer en Principauté. Vendredi soir, le musicien donne un unique concert en interprétant le concerto n°19 pour piano de Mozart, à la harpe.

Ce concert s’avère hors normes à plusieurs titres. Donnée dans le cadre de la deuxième édition "Mozart à Monaco", cette œuvre n’a encore jamais été interprétée en Principauté. Xavier de Maistre ne l’a, quant à lui, pas reprise depuis deux ans… Et ne la jouera qu’une seule fois cette année avant d’enchaîner trois autres programmes, la semaine prochaine, en Allemagne. Entre deux répétitions, Xavier de Maistre se confie.

En quoi l’interprétation d’une partition pour piano à la harpe est novatrice et pertinente?

Quand j’ai commencé ma carrière de soliste, j’ai beaucoup travaillé sur le répertoire. J’avais la vision que la harpe pouvait être un instrument attractif. Mais elle n’avait pas de répertoire de compositeurs connus. C’est pour cette raison qu’il y avait si peu de demandes pour la harpe en tant qu’instrument soliste. Quand j’ai décroché un contrat avec Sony, j’ai commencé avec un premier album qui proposait des œuvres de Debussy. Je reprenais ses œuvres au piano à la harpe. Puis, assez rapidement, j’ai préparé un album Mozart où j’ai repris un concerto pour piano que j’ai arrangé pour mon instrument. Sur les 27 concertos, j’en ai choisi un qui était particulièrement adapté.

Est-ce un travail difficile?

Quand je fais des adaptations, je fais toujours en sorte pour que l’arrangement sonne différemment. Mais que l’on n’ait pas à regretter la version originale. Ce concerto se joue dans une tessiture qui sonne particulièrement bien à la harpe. Mais il est redoutable car beaucoup plus difficile à la harpe qu’au piano.

Une difficulté qui relève du défi?

C’est une pièce que j’ai beaucoup jouée. Mais à chaque fois que je dois la reprendre, j’ai des sueurs froides! Pour avoir la même virtuosité qu’au piano, cela demande plus de contrôle et de maîtrise. Ce qui est intéressant, c’est que le son de la harpe correspond davantage à celui du piano-forte, piano utilisé par Mozart à l’époque. On retrouve les timbres et les couleurs, l’origine de l’œuvre de Mozart.

 

"Monaco est devenue au niveau de Paris ou de Munich"

Parvenez-vous à changer l’image de la harpe, sa place dans la musique classique?

À force d’occuper les scènes et être présent sur les émissions de radio, à force de travail et d’enregistrement, cela donne des idées à certains programmateurs. Quand j’ai commencé, il n’y avait quasiment jamais de harpe en soliste avec un orchestre. Cela a un peu changé. Bien sûr, nous sommes encore loin du piano ou du violon mais aujourd’hui cet instrument est devenu une possibilité. J’ai acquis une certaine notoriété et je peux susciter des commandes auprès de grands compositeurs vivants. Il y a quatre ans, une compositrice finlandaise, Kaija Saariaho, m’a écrit un concerto que j’ai repris avec une vingtaine d’orchestres. Un compositeur hongrois, Péter Eötvös, vient de me finir un concerto que je vais jouer la saison prochaine avec six grands orchestres dont Paris, Vienne, Berlin et Tokyo.

Vous, comme l’OPMC, montrez que les musiciens classiques savent être innovants…

Je pense qu’avec la venue de Didier de Cottignies comme délégué artistique, Monaco est devenue au niveau de Paris ou de Munich. Il suffit de voir la qualité des solistes et des chefs qui viennent aujourd’hui en Principauté. C’est absolument remarquable. Je ne vois pas ce que l’on pourrait souhaiter de plus lorsque l’on voit la programmation du piano.

Monaco, une capitale des arts et de la culture?

Il y a là une densité unique au monde. Monaco est un carrefour extrêmement international, une plaque tournante au rayonnement mondial. Je regrette d’entendre parfois, loin d’ici, beaucoup d’a priori qui tendent à véhiculer l’idée d’une Principauté surannée. Le pays a un problème d’image. Il y a pourtant ici tous les ingrédients pour faire plus encore briller ce Rocher.

Savoir+
Pour réserver sa place au concert, se rapprocher de la billetterie de l’atrium: +377.92.00.13.70.

Il commence la harpe à l'âge de 9 ans

Xavier de Maistre commence des études de harpe, à l’âge de neuf ans, au conservatoire municipal de Toulon. Il parfait sa formation musicale à Paris. En parallèle, toujours au sein de la capitale, Xavier de Maistre décroche son diplôme de Sciences-Po et de la London School of Economics. Il obtient la médaille d’or du prestigieux concours américain USA International Harp Compétition. À l’âge de 22 ans, le harpiste solo est le premier musicien français, à rejoindre les rangs de l’Orchestre Philharmonique de Vienne.

En plus de donner des master classes, il enseigne à la Musikhochschule de Hambourg. En 2009, il reçoit le trophée Instrumentiste de l’année aux Echo awards.

Xavier de Maistre quitte l’Orchestre Philharmonique de Vienne en 2010 pour se consacrer entièrement à sa carrière soliste. Avec cet objectif qui le porte dès ses débuts, celui de mieux faire connaître la harpe. C’est pour cette raison qu’il introduit de nombreux compositeurs dans le répertoire et transcrit des partitions, de manière qu’elles puissent être jouées avec l’instrument. Il enregistre exclusivement sous le label Sony Music depuis 2008. Son premier disque s’intitule Nuit d’étoiles et est consacré à Claude Debussy.

Forcer le destin

"Rien ne me prédisposait à devenir musicien. J’ai même poursuivi mes études à Sciences Po Paris puis à la London School of Economics. Un cursus que je ne regrette pas du reste car il m’a permis de gérer moi-même ma carrière d’artiste et d’avoir un regard de « manager » sur mon propre travail comme sur celui des organisateurs de spectacles. Enfant, je n’avais pas une oreille absolue. La professeur de solfège a vite décrété que je ferai mieux de jouer au football parce qu’elle me considérait sous-doué pour la musique. En revanche, j’avais une bonne dextérité et une bonne coordination. Et surtout une envie de faire plaisir à mon professeur de harpe ; ce qui a été déterminant. La harpe est un instrument très solitaire et très physique. C’est l’un des rares instruments avec lequel on fabrique pleinement le son.”

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