Sur le climat, "on met de petites touches, alors que c’est l’ensemble du tableau qu’il faut reprendre", Pierre Cannet, directeur du plaidoyer à WWF

Le 6e rapport du Giec est en train d’être discuté, en Suisse, en vue de l’approbation du texte de synthèse sur le dérèglement climatique. C’est le moment où la communauté scientifique mondiale dresse un bilan des connaissances autour des changements actuels et futurs. Le fonds mondial pour la protection de l’environnement WWF assiste “dans une logique d’observateur” à ce rendez-vous mondial. Pour Pierre Cannet, le directeur du plaidoyer chez WWF France, “les décideurs ont toutes les clés en main”. Pour lui, “la France patine” pour tenir ses engagements.

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Sonia Bonnin Publié le 15/03/2023 à 09:05, mis à jour le 15/03/2023 à 09:25
interview
Pierre Cannet, directeur de plaidoyer WWF France DR WWF

Que peut-on attendre des discussions sur la 6e synthèse du Giec?

"Le rapport de synthèse peut être considéré comme la courroie de transmission entre la science et la décision. Entre les experts, les scientifiques et les décideurs politiques. La synthèse vient sélectionner et réunir, en quelques pages, tous les chapitres de tous les rapports du Giec, menés dans le cadre de cette sixième évaluation.

Ainsi, c'est un peu un outil clé en main à la décision. On vous dira où en sont les émissions, combien de temps on peut durer comme ça, si on veut limiter à 1,5°C de réchauffement, ou bien à 2°. Quels sont les impacts et les conséquences sur les précipitations, sur la fonte des glaces, sur l'énergie…"

Est-ce qu’il y a un enjeu de négociation pendant cette semaine?

"Souvent, cela se joue sur quelques mots choisis et sur quelques graphiques. Parfois des conclusions peuvent poser problème, politiquement parlant. Les pays envoient leurs experts pour pouvoir négocier et discuter des mots qui sont choisis dans la synthèse. Tout ce qui touche plus à de la politique, que de la science, peut poser problème. Vous voyez parfois que la frontière est fine, en déclarant que les pays ne sont pas au niveau de leurs engagements climatiques. Il y aura des mots choisis qui peuvent froisser les Etats pétroliers, ou froisser les pays qui n’en font pas assez."

La balle est dans le camp des décideurs?

"La balle a toujours été dans leur camp, depuis que les rapports du Giec sont publiés. Le fait de ne pas agir amène à voir effectivement des décideurs qui ne sont pas au niveau. Les premières condamnations arrivent, avec une forme de judiciarisation. Mais la première des condamnations est celle des effets de l’urgence climatique. Quand on voit, ne serait-ce qu'en France, l'état de la sécheresse hivernale et les conséquences que certains avaient du mal à imaginer il y a quelques années. Le GIEC, dans ses rapports, avait déjà livré ces évolutions. Et ce n'est que le début."

Sécheresse dans le sud-est de la France Philippe Arnassan.

Peut-on s’attendre à des actions concrètes après ce rapport de synthèse?

"Alors oui, ce qui est clair, c'est que maintenant, les décideurs ont toutes les clés en main. Cette synthèse est justement faite pour les décideurs. Elle réunit clairement les conclusions et donc c'est sur cette base qu'on espère de nouveaux engagements, à la COP 28. Il ne faut pas confondre les rôles parce que si aujourd'hui on est dans la mouise, c'est bien parce que les décisions politiques n'ont pas été prises. Aujourd'hui, c'est plutôt des petites touches qui sont mises alors que c'est l'ensemble du tableau qu’il faut reprendre."

Et en France?

"Le président de la République s'est engagé d’aller deux fois plus vite dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Si on s'arrête juste au budget, c'est-à-dire le nerf de la guerre, on voit que 66 milliards de dépenses sont néfastes au climat. Est-ce que le budget de la France, qui a été conclu avant Noël, si on le passait au filtre climatique, serait compatible avec la trajectoire de la France? On met quatre fois plus de moyens financiers pour détruire la diversité que pour la protéger. Vous voyez les ordres de grandeur. Des centaines de milliards sont mis sur la table et les moyens ne sont pas au service de la transition écologique."

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