Voilà trois semaines et des poussières, il avait fait un passage éclair dans le paddock du Grand Prix de Monaco Historique. Le temps d’admirer certaines nobles mécaniques d’antan frappées du cheval cabré, et de s’imprégner de cette atmosphère à nulle autre pareille. Après un an de disette, le circuit de Monaco vient de ressortir de terre. Un champ d’action où Charles Leclerc espère forcément prolonger la montée en puissance actuelle de la Scuderia Ferrari. Passé tout près du podium lors de la précédente étape du côté de Barcelone, le chouchou des tifosi se sait attendu au tournant dans ce jardin d’enfant qu’il aime plus que tout.
Charles, il y a deux mois, avant d’entamer cette saison 2021, auriez-vous signé pour débarquer aujourd’hui à Monaco en 5e position de la hiérarchie provisoire à seulement 7 points du top 3?
Non, je n’aurais pas signé. Tout simplement parce que je veux toujours faire mieux tant que je ne suis pas au sommet. Chaque année, quand sonne l’heure du premier Grand Prix, je ne signe que pour une seule place: la première! Même si je sais que l’avenir à court terme ne s’annonce pas super rayonnant, je crois toujours à la gagne. Cela dit, soyons réalistes: en début de saison, après un exercice 2020 aussi compliqué, difficile d’espérer mieux. L’équipe a beaucoup progressé, elle travaille bien pour remonter la pente. Lors des quatre courses disputées jusqu’à maintenant, nous avons réussi à maximiser le potentiel de la voiture. Bref, on est sur la bonne voie.
Comment expliquez-vous ce bond en avant?
Clairement, je pense qu’il résulte du gros boulot accompli durant la saison 2020. Au début, il a fallu prendre conscience du fait que l’on avait perdu pas mal de terrain. Une fois la situation acceptée, on s’est retroussé les manches et on a travaillé tous ensemble de manière constructive. De quoi enregistrer assez vite des petits progrès. Compte tenu des restrictions et autres gels imposés l’hiver dernier concernant le développement, toutes les modifications techniques nécessaires n’ont pas pu être accomplies. Mais les résultats obtenus maintenant démontrent que notre job est payant. À nous de prolonger la dynamique actuelle.
Dans quel domaine la voiture a-t-elle le plus évolué?
Difficile de mettre en exergue tel ou tel organe. Je préfère souligner la montée en puissance du package global: moteur, châssis, aéro. Dans ces trois secteurs clés, nous avons franchi un palier significatif. On est plus compétitif, autant en qualifications qu’en course.
Que vous manque-t-il pour faire jeu égal avec Mercedes et Red Bull?
Honnêtement, aujourd’hui, ils ont plus de puissance, une meilleure voiture en général. Nous, on possède une monoplace bien équilibrée, assez homogène. Je ne vais pas entrer dans les détails. Juste souligner que l’on a défini les axes de travail prioritaires et les éléments à optimiser pour la conception de la Ferrari 2022. Cette voiture, il faudra la réussir. On doit encore produire beaucoup d’efforts afin de combler totalement notre retard.
Conclure un week-end parfait au pied podium comme l’autre dimanche à Barcelone, ce n’est pas trop frustrant?
Non, quand on a donné le maximum en piste, avec des réglages satisfaisants et une stratégie efficace, finir 4e, je le prends comme un encouragement. Je suis objectif. Je me dis qu’il faut en passer par là. Que cela fait partie de la reconstruction du team. Évidemment, la place de la Scuderia Ferrari, en F1, elle se situe sur le podium. Tout en haut, de préférence. Je le répète: nous allons dans la bonne direction. Voilà le plus important. J’ai d’ailleurs bon espoir d’être en mesure de me battre à nouveau pour la victoire très bientôt.
En 2021 ou en 2022?
Très bientôt, à l’échelle de la Formule 1, c’est plutôt 2022. En 2021, la cible me semble hors de portée à la régulière. L’an prochain, en revanche, on découvrira des monoplaces nouvelles, très différentes. Ce virage technique va créer une opportunité que Ferrari devra absolument saisir.
À Maranello, les cerveaux de la Scuderia étudient-ils encore des évolutions à greffer sur la SF21 dans les semaines à venir ou sont-ils déjà entièrement tournés vers 2022?
Comme partout ailleurs, ils planchent essentiellement sur la prochaine voiture. Pour 2021, hormis les différents kits aérodynamiques adoptés en fonction des profils des circuits, il n’y aura plus de changements. Donc pas de miracle à attendre. On va juste essayer d’utiliser au mieux le matériel actuel.
Il paraît que le tracé atypique de Monaco réduit les écarts entre les F1. Ici, le pilote peut faire la différence, dit-on. Vrai ou faux?
C’était vrai à une époque. Encore un peu aujourd’hui, je pense. Pff, toutes les équipes sont tellement bien préparées. Le pilote, il peut grappiller 2 dixièmes, 3 dixièmes, pas plus. Donc pas de quoi aller aussi vite que les Mercedes et les Red Bull, surtout quand il y a un Lewis Hamilton ou un Max Verstappen à bord. Après, on ne sait jamais. La place au départ, elle se joue sur un tour rapide, en Q3. Comptez sur moi, je jetterai toutes mes forces dans la bataille des qualifications, avec l’ambition de rester dans le top 4. Mais si tout va bien pour eux, ce sera quasi impossible de les challenger...
Cette semaine de course à domicile si spéciale, vous la préparez comme les autres?
Oui, à peu près. L’approche ne varie pas. On commence par beaucoup de simulateur, puis on définit les options techniques les plus appropriées avec les ingénieurs. La principale différence, elle se situe dans le timing du week-end. Ici, les essais libres 1 et 2 se déroulent le jeudi au lieu du vendredi. Ça laisse une journée entière pour analyser les données et corriger le tir, si besoin.
Si vous n’étiez pas l’enfant du pays, ce mythique tracé urbain figurerait-il tout de même en pole position sur la grille de vos circuits favoris?
Ah oui, sûr et certain! D’une manière générale, je préfère les pistes en ville parce que j’adore tutoyer la limite sans avoir le droit de la dépasser. À Monaco, les rails de sécurité et les murs de protection sanctionnent le moindre écart. Ils ne pardonnent pas la plus petite erreur. Moi, en tant que pilote, c’est ce défi qui me fait vibrer. Débouler dans ces rues à de telles vitesses procure des sensations incroyables, indescriptibles. J’aime ce frisson unique.
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