Groupement d'intérêts publics du GP de France de F1: de "graves irrégularités" dans les dépenses?

Dans une lettre confidentielle adressée à Christian Estrosi, le président du conseil départemental du Var dénonce certains frais suspects engagés. En jeu: plus de 27 millions d’euros de déficit.

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Michaël Zoltobroda Publié le 01/02/2023 à 20:51, mis à jour le 01/02/2023 à 21:09
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En tant que président du GIP Grand Prix de France, Christian Estrosi est en première ligne sur ce dossier polémique. Photo doc Dominique Leriche

La dissolution du Groupement d’intérêts publics du Grand Prix de France (GIP) sera-t-elle vraiment votée ce jeudi, comme prévu à l’ordre du jour du conseil d’administration? Plusieurs mois que le dossier, déjà reporté, traîne sur la table. Avec toujours près de 30 millions d’euros de déficit à régler. Et rien ne dit que l’affaire sera bouclée à la fin de la séance. D’après nos informations, le président du conseil départemental du Var, qui est l’un des principaux actionnaires tout comme la Région, y est catégoriquement opposé. Et pour cause.

Fin janvier, Jean-Louis Masson a écrit à Christian Estrosi, président de l’organisation en charge de la promotion de l’épreuve de F1 au circuit Paul Ricard du Castellet. Dans ce courrier confidentiel, que nous nous sommes procuré, il y dénonce "de nombreuses et graves irrégularités relevées" concernant les dépenses des six dernières années. Le tout détaillé dans une note annexe "non exhaustive". Il serait notamment question de pressions exercées sur des élus, de frais de bouche et de déplacements à l’étranger jugés très onéreux ou de l’attribution suspecte de certains marchés. Entre autres.

Le président LR du Var poursuit en déplorant une "opacité imposée" aux différents actionnaires, excepté la Métropole de Nice et la Région Sud dirigées par des ex-Républicains devenus macronistes. Celui-ci précise que "tant qu’on ne connaîtra pas le bien-fondé des dépenses, les participations ne pourront être versées".

Un recours au préfet de région Paca?

Contacté, Masson évoque la difficulté à obtenir les détails et la complexité du dossier, dont l’analyse poussée prendrait plusieurs mois. "On a encore des questions à poser sur beaucoup de choses", souligne-t-il, appelant à un audit externe. Pour combler les trous, il est toujours prévu que le Département du Var débourse 4,5 millions. Au minimum. Idem pour la Métropole TPM et celle de Nice.

Avec l’appui d’Hubert Falco et de la communauté d’agglomération Sud-Sainte-Baume, Jean-Louis Masson compte donc sur une minorité de blocage pour contrecarrer la dissolution du GIP du Grand Prix de France et ne "pas cautionner" les comptes. Il propose tout de même une alternative: demander que le préfet de région Paca prenne un arrêté en ce sens, ce qui déplacerait la responsabilité. Une idée qu’il a soumis à Renaud Muselier, lors d’un rendez-vous en tête à tête mardi. Puis au maire de Toulon, le lendemain.

De son côté, l’entourage de Christian Estrosi sort le bouclier antimissiles, en évoquant une "manne" financière dont le Var a particulièrement "bénéficié". Le chiffre de 140 millions d’euros est avancé (cabinet In Extenso). Il est ensuite rappelé que l’ensemble des actionnaires a "tout voté". Autre argument: "S’il y a un changement de gouvernance dans le Var, nous n’y sommes pour rien." Il est directement fait référence au remplacement cet automne de Marc Giraud, condamné dans une affaire d’emploi fictif à cinq ans d’inéligibilité (peine dont il a fait appel).

La direction contre-attaque

Le directeur général du GIP Eric Boullier, un des trois derniers en CDI à ne pas avoir été licencié, a également été envoyé au front pour défendre son bilan et rejeter les accusations, "sans volonté de polémiquer inutilement". Les pressions sur des élus? "Excessif et erroné". Les allégations sur d’éventuels marchés publics litigieux? Il est demandé plus de précisions pour "apporter des réponses satisfaisantes".

Au sujet des "frais de bouche", ceux-ci correspondraient aux "marchés passés avec les traiteurs concernant les espaces d’hospitalité du Grand Prix, qui ont tous des spécificités différentes et qui sont refacturés aux clients finaux." Quant aux frais de déplacement, Eric Boullier rappelle à Jean-Louis Masson que "la Formule 1 est un sport mondial avec plus de 22 épreuves se déroulant à travers le monde".

Ce qui nécessiterait "un certain nombre de déplacements afin de pouvoir y organiser les réunions nécessaires avec les détenteurs de droits, les fédérations sportives impliquées". Ainsi que "les diffuseurs et l’ensemble des promoteurs afin d’organiser au mieux l’épreuve française dans les meilleures conditions". Des explications qui n’ont, pour l’heure, pas convaincu les responsables varois.

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